Il était très attendu. Amadou Ba, leader de la « coalition JAMM AK NJARIN » s’est prêté à l’exercice de questions/ réponses des journalistes dans le cadre des élections législatives anticipées. Il fallait, pour lui, mettre en lumières les réalités que traverse notre pays. Mais, d’emblée, l’ancien Premier ministre a adressé sa solidarité aux populations qui vivent dans des conditions difficiles à Bakel et à Matam. Car, indique-t-il « il fallait une action coordonnée du gouvernement face aux conditions météorologiques extrêmes et en insistant sur les ressources du pays et de répondre à cette crise ». Mais, à l’en croire, il est impératif que ces actions soient menées avec rigueur. Dans sa déclaration liminaire, l’ancien Premier ministre est revenu sur les raisons de leur mutisme face à la situation du pays.
Accusation contre lui: « je n’ai jamais falsifié de statistiques budgétaires »
Amadou Ba n’a pas mis de gants pour balayer d’un revers de la main les accusations du régime en place. « Je ne suis pas pour la polémique, car les attentes sont ailleurs. Mais je rappelle que tout au long de ma carrière, j’ai servi le pays avec transparence et intégrité et aucune écriture ne peut m’être imputée dans une quelconque gestion frauduleuse. Je n’ai jamais été épinglé. J’ai servi ce pays dans le respect strict des règles de bonne gouvernance et je rends grâce à Dieu. On m’accuse sans apporter des preuves. Je n’ai jamais falsifié de statistiques budgétaires et je nourris des doutes sur un quelconque rapport d’audit dans ce sens. Je rappelle juste que de 2019 à 2023, je n’étais plus ministre de l’Economie. Le 6 avril 2019, j’ai terminé ma mission alors pourquoi me tenir responsable d’une quelconque malversation? Il y a une volonté délibérée de nuire », a-t-il répondu à ses détracteurs.
Selon lui, il faut répondre aux besoins et aux attentes et non faire dans la diversion. A ce titre, Amadou Ba demande au régime de se concerter sur l’essentiel et pour le bien de tous. Car, dit-il « depuis mon entrée dans le gouvernement en 2013, aucun immeuble, aucun appartement, aucune villa de l’Etat ne m’a été cédé, encore moins un terrain. Ces accusations d’accaparement de biens publics c’est de la calomnie. Je n’ai jamais détourné les biens de l’Etat. » Face à la presse, le candidat malheureux à la dernière présidentielle a brandi des chiffres, arguant qu’il est l’un des artisans du Pse (Plan Sénégal Emergent) qui a créé une dynamique de croissance forte soutenue sur 5 années consécutives. « Cette trajectoire a fait que le PIB avait enregistré une hausse moyenne de 6 % sur la période 2014-2019. 6,6% sur la période 2014-2018″, soutient-il.
« Contrastant avec la période 1980-2013, ou la croissance était de 3%, le PIB était de 9775 en 2014 et 13.197 en 2019 quand je quittais le ministère des Finances. Des données publiées sur le site de l’ANSD. Je tiens à préciser que le jour de ma passation de service, le 15 avril 2019, j’ai laissé en trésorerie, auprès de la Banque centrale, près de 270 milliards (soit un peu plus de 500 millions d’euros) et cette somme est consignée dans le Pv de passation. En matière de Finances publiques, les résultats parlent d’eux-mêmes. Les recettes budgétaires et la performance de nos administrations financières ont connu une croissance passant de 2345 milliards en 2012 à 4000 milliards en 2018. Nous avons su mobiliser les PTF et une situation financière maîtrisée et un endettement efficient. En 2012, la dette de l’administration centrale était de 4958 milliards, soit 3312 milliards de dette extérieure à long terme et 1280 milliards de dette intérieure. En 2109, quand je quittais le ministère, la dette était de 7825 milliards, soit 7173 milliards de dette extérieure et 652 de dette intérieure. Nous avions pu obtenir la notation que nous venons de perdre », a-t-il argumenté. «J’ai mis en place une stratégie de développement avec des progrès significatifs et le renforcement des infrastructures mais également l’amélioration des conditions de vie des populations. » Sur la baisse de la note du pays, Amadou Ba dit avoir des craintes surtout pour les bailleurs devant appuyer ce pays. « C’est dangereux de faire des déclarations hâtives. Ce sera très difficile pour ce pays et ce régime », regrette ce dernier.
Lors de cette rencontre, Amadou Ba a appelé la classe politique à voter à l’Assemblée nationale, après les élections « une loi de finance en procédure d’urgence sans débat », car « il faut des solutions immédiates ». « Au mois de janvier, le gouvernement aura des moyens et avec une loi de finance rectificative. Si cette situation n’est pas réglée d’urgence, ce sera très difficile pour les sénégalais, car il faut des réponses urgentes pour le bien du pays », a-t-il indiqué.
Vision Sénégal 2050 : des similitudes avec le Pse
S’agissant du programme « Visions Sénégal 2050″ lancé par le régime en place, Amadou dit ne pas être surpris quant à certaines similitudes avec le Pse et certaines de ses propositions de campagne lors de la présidentielle. « La Vision 2050 reprend les bases établies par le Pse dont les 3 axes. Elle ne doit pas se limiter à des discours mais sur des résultats tangibles. Cette situation de risque décrite, si elle est évérée, prouve qu’il faudra du temps pour être vraimemt dans sa phase de réalisation », a-t-il noté. Il n’a pas passé sous silence les accusations portées à son endroit par ceux qui le taxent de «fonctionnaire milliardaire.» Se voulant catégorique, il assène ses vérités : « Je ne possède pas la richesse et je n’en ai pas besoin. Je partage le peu que j’ai. Mon travail et ma compétence m’ont permis de gagner sa vie comme cela aurait été le cas pour tout homme servant de l’Etat avec la même trajectoire que moi. J’ai formé des inspecteurs des impôts et des domaines dont Ousmane Sonko. Mais je les invite à publier leurs revenus perçus tout au long de leur carrière. »
Arrestation de Bougane : « C’est ignoble »
Sur l’arrestation du leader de Guem sa bopp, membre de la coalition Samm sa Kaddu, Amadou Ba dit ne pas être en phase. Il souhaite que ce dernier recouvre la liberté pour rejoindre sa famille car « les pandores pouvaient l’encadrer pour qu’il rallie Bakel et retourne chez lui. » Il a estimé que les populations doivent reprendre le pouvoir, car, il est anormal que ce régime « prend tout » et donc, « il faut une majorité à l’Assemblé et proposer des alternatives. Car l’heure n’est pas au discours et au tâtonnement, mais à la rigueur. » Et de poursuivre : « Il est clair que nous sommes dirigés par un régime qui ne peut pas prendre la pleine mesure de ses obligations. Un pilotage à vue, mais les problèmes persistent. Au lieu de s’attaquer aux vraies questions, on menace par l’intimidation en faisant taire les autres. Le peuple mérite mieux que cela car le pouvoir ne fait que dans la peur et la contrainte. Il faut le dialogue. Le pouvoir ne s’exerce par la persuasion », fait-il savoir.
Présidentielle 2024, sa relation avec Macky et Sonko
Pour Amadou Ba, ses relations avec Macky Sall ne sont pas au beau fixe. « Il m’a honoré et m’a choisi comme étant son successeur. Lors de la campagne, on a émis l’idée de repousser l’élection présidentielle mais j’ai refusé. Parce que ce n’était pas bien pour ce pays. Le pays courait un risque,… Je m’en arrête là. Il y avait vraiment des gens qui n’avaient pas mouillé le maillot. Cela a participé à la défaite », a révélé Amadou Ba.
Pour le cas Ousmane Sonko, il fera savoir n’avoir jamais prononcé un mot de trop à son endroit, mais il le qualifiait comme étant « son ami. » « Nous avons travaillé ensemble (Sonko) et je connais sa famille. Je le connais bien. Je n’ai pas de problème avec qui que ce soit. Mais la trajectoire sur laquelle je me situe, c’est le pays qui a des difficultés. C’est cela le problème. On ne peut pas construire ce pays sur des déclarations qui tendent à créer la division et sur un discours sur des difficultés financières. Un budget est complexe et donc, un gouvernement doit trouver des solutions avec des crédits pour les sinistrés par exemple» a dit la tête de liste nationale de la coalition JAMM AK NJARIN ».
MOMAR CISSE