L’année 2024 a été marquée par une série d’affaires judiciaires retentissantes au Sénégal. Arrestations de figures politiques, scandales financiers, violences électorales et réformes législatives ont rythmé une période où justice et politique se sont souvent croisées. Si ces événements illustrent une volonté de renforcer la transparence et la redevabilité, ils ont également révélé des tensions croissantes entre la justice, la politique, et la société civile. Voici un retour détaillé sur une année intense.
Les arrestations spectaculaires : des figures publiques sous les projecteurs
. Jérôme Bandiaky alias « Sniper » : une arrestation mouvementée
L’arrestation de Jérôme Bandiaky, surnommé « Sniper », ancien chef des « Marrons du feu », a marqué les esprits. Interpellé à son domicile par la Division des investigations criminelles (DIC), il a été interrogé sur son passeport diplomatique, son logement de fonction, et un bâton télescopique retrouvé lors de la perquisition. Bien qu’il ait été souvent cité dans l’affaire des disparitions de Fulbert Sambou et Didier Badji, cet aspect n’a pas été abordé par les enquêteurs. Ses avocats ont dénoncé une arrestation humiliante et une procédure jugée irrégulière, notamment en raison de l’absence de mandat.
. Lat Diop : Le scandale des 5 milliards et la chute d’un ancien ministre
Parmi les affaires financières ayant marqué l’année, celle de Lat Diop, ancien ministre des Sports et ex-directeur général de la LONASE, a dominé les discussions. Accusé de détournement de deniers publics, d’extorsion et de blanchiment de capitaux, il est impliqué dans un scandale autour de 5 milliards de francs CFA. Selon le patron de 1XBet Sénégal, Mouhamed Dieng, cette somme lui aurait été remise en plusieurs tranches, prétendument pour l’achat de biens immobiliers à l’étranger, notamment une résidence à Grenoble. Lat Diop a nié catégoriquement ces accusations, dénonçant une manœuvre politique visant à le discréditer.
Son arrestation et son placement sous mandat de dépôt par le Pool judiciaire financier témoignent de la rigueur avec laquelle cette nouvelle juridiction traite les affaires économiques majeures
. Khadim Bâ et les 215 milliards : Un duel juridique avec la Douane
Khadim Bâ, directeur général de Locafrique, est également tombé sous le coup de la justice. Poursuivi pour des infractions douanières évaluées à 215 milliards de francs CFA, il a été placé sous mandat de dépôt après plusieurs convocations infructueuses.
L’affaire concerne une violation présumée de la réglementation des changes et des liens supposés avec Dermond Oil & Gas Africa, société spécialisée dans le secteur pétrolier. Les avocats de Khadim Bâ contestent vigoureusement ces accusations, arguant que leur client n’a aucune responsabilité légale dans cette entreprise.
Ce contentieux met en lumière la complexité des affaires économiques au Sénégal et les tensions croissantes entre le secteur privé et les institutions de contrôle de l’État.
. Samuel Sarr : Un ancien ministre face à des accusations de fraude
L’ancien ministre de l’Énergie, Samuel Sarr, a été interpellé à l’aéroport de Dakar à son retour de Dubaï. Il est accusé de détournement de fonds dans le cadre de l’affaire de la centrale électrique de Cap des Biches, impliquant un trou financier de 8 milliards de FCFA révélé par un audit du cabinet Mazars.
Samuel Sarr a toujours affirmé que les fonds déposés sur les comptes de la société West Africa Energy étaient légitimes et provenaient de transactions commerciales. Ses avocats dénoncent une procédure injuste et un acharnement visant à ternir sa réputation.
. Bougane Gueye Dany : un opposant politique sous pression
Le leader de Guem Sa Bopp a été arrêté à plusieurs reprises cette année. Accusé de diffusion de fausses nouvelles et de diffamation, il a été placé en garde à vue par la Division spéciale de la cybersécurité. Une seconde arrestation à Bakel, où il rendait visite à des sinistrés, a suscité une vive indignation.
Bougane Gueye Dany est devenu un symbole des tensions entre le pouvoir et les figures de l’opposition, notamment en raison des multiples poursuites judiciaires à son encontre.
. Cheikh Yerim Seck : un journaliste dans la tourmente
Cheikh Yerim Seck, célèbre journaliste sénégalais, a été placé en garde à vue par la Division spéciale de la cybersécurité pour diffusion de fausses nouvelles et diffamation. Cette affaire, liée à des propos tenus lors d’une émission publique, met en lumière les tensions croissantes entre le pouvoir et la presse au Sénégal.
. Ameth Ndoye : usage de faux et blessures involontaires
Le chroniqueur médiatique Ameth Ndoye a été arrêté pour avoir présenté une attestation falsifiée à la suite d’un accident corporel à Sébikotane. Accusé de conduite sans permis et usage de faux, il a été placé en garde à vue après avoir omis de fournir les documents nécessaires. Cette affaire met en lumière les pratiques administratives douteuses et les conséquences de la complaisance dans la gestion des infractions routières.
. Bah Diakhaté : l’activiste face à la justice
Bah Diakhaté, connu pour ses prises de position critiques sur les réseaux sociaux, a été arrêté après la publication d’une vidéo dans laquelle il interpellait le Premier ministre. Il a été placé en garde à vue pour diffusion de fausses nouvelles.
. Amath Suzanne Camara : propos jugés offensants contre le chef de l’État
Membre de l’APR, Amath Suzanne Camara a été arrêté après avoir publiquement traité le président de « menteur » lors d’une émission. Il a été condamné à une peine de prison ferme pour offense au chef de l’État et discrédit sur les institutions.
. Commissaire Cheikhouna Keïta : un EX cadre critiquant le régime arrêté
Cheikhouna Keïta, ancien patron de l’OCRTIS, a été arrêté pour diffusion de fausses nouvelles concernant une prétendue altercation au Palais présidentiel. Ce cas reflète les tensions croissantes entre le pouvoir et ses critiques internes.
.Adama Gaye : une voix médiatique sous pression
Le journaliste Adama Gaye a été convoqué à la DIC pour des propos diffusés sur les réseaux sociaux concernant le décès de l’ancien ministre des Finances, Mamadou Moustapha Bâ. Placé en garde à vue, il a été déféré au parquet, relançant les débats sur la liberté d’expression et la protection des journalistes.
.Moustapha Diakhaté : de la critique à la condamnation
L’ancien président du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar a été condamné à deux mois de prison pour « insultes via un système informatique » et « troubles politiques graves ». Avant cela, il avait été placé sous mandat de dépôt après des propos critiques envers le régime en place.