Cette situation actuelle des lanceurs d’alerte est décrite par le directeur Afrique de l’ouest et francophone de la plateforme de protection de lanceurs d’alerte en Afrique (PPLAAF) alors qu’il animait une conférence publique à Dakar. M. Kande ira même jusqu’à dire qu’il ne suffira pas simplement de pouvoir voter une loi, mais il faudrait s’assurer de son application en passant par la sensibilisation et de son appropriation par la population.
Comme vous le savez, le président de la République avait émis dernièrement le vœu de pouvoir doter le Sénégal d’une loi qui protège le lanceur d’alerte. C’est dans ce cadre que Jimmy Kande, le directeur Afrique de l’ouest et francophone de la PPLAAF rappelle qu’une lettre avait été adressée aux autorités afin de pouvoir établir les éléments essentiels notamment sur le signalement, l’anonymat, sur la confidentialité, etc. La même source de préciser qu’un lanceur d’alerte c’est toute personne travaillant dans une organisation qui est témoin des activités illicites et illégales qu’il décide de pouvoir dénoncer dans le but de pouvoir provoquer un changement et de pouvoir mettre fin aux activités illicites et illégales dans son entreprise.
En revanche, le Directeur de la PPLAAF admettra que la situation des lanceurs d’alerte est déplorable dans la mesure où malgré le fait que plusieurs pays ont pu signer cette convention des Nations unies qui appelle à la protection des lanceurs d’alerte, on se retrouve uniquement avec onze (11) pays qui ont des lois qui protègent les lanceurs d’alerte. « Cette loi doit comprendre plusieurs critères qui ne sont peut-être pas exhaustifs, mais pour lesquels nous avons pu relever ce qui était important, notamment en ce qui concerne une définition claire du statut de lanceur d’alerte, quel est le champ d’action du lancement d’alerte, quels sont les canaux de signalement qui vont être mis en place, est-ce qu’il y aura une autorité qui sera chargée de suivre les enquêtes, quelle est la protection qu’on accorde réellement, quelles sont les types d’ immunités qu’on accorde réellement aux lanceurs d’alerte, quelle est l’aide qu’on apporte réellement aux lanceurs d’alerte, qui peut être financière, qui peut être psychologique et comment est-ce que cela va se faire très exactement, ce sont les éléments que nous avons pu relever dans la lettre que nous avons adressée. (…) Il n’y a pas de pays francophones qui ont des lois qui protègent les lanceurs d’alerte, ce qui fait que beaucoup de lanceurs d’alerte sont aujourd’hui exposés et sont contraints à l’exil et dès fois ils sont tués à cause de leur révélation en Afrique », révèle-t-il.
Par ailleurs, après avoir évoqué quelques acquis de la plateforme au niveau du Sénégal notamment avec des journalistes sénégalais qui ont travaillé en consortium et qui ont publié des articles sur le trafic de bois de rose entre la frontière malienne et sénégalaise, Jimmy Kande ajoute que si cette loi est votée cela fera du Sénégal le premier pays francophone à se doter d’une loi de protection des lanceurs d’alerte. « Je sais qu’il y’a des initiatives qui sont en cours actuellement en Côte d’Ivoire, au Burkina, mais il n’y a pas encore un pays francophone qui a une loi qui protège le lanceur d’alerte donc le Sénégal peut être un exemple dans le monde francophone et cela pourrait servir d’exemple pour d’autres pays », avance-t-il.
Pour rappel, il y’a bien évidemment une différence entre un lanceur d’alerte et un activiste, puisque le premier c’est quelqu’un qui a une relation contractuelle avec une organisation et qui finit par révéler les informations lorsqu’il pense que ces informations sont illicites ou illégales alors que l’activiste c’est quelqu’un qui porte une cause et ça peut être l’environnement, ça peut être le droit des femmes, mais pas nécessairement qui travaille et qui va être témoin de faits.
Enfin il faut noter que cette loi, une fois votée, viendra déjà reconnaître ce qui est un lanceur d’alerte, expliquer le processus de lanceur d’alerte parce qu’aujourd’hui ceux qui veulent dénoncer ne savent pas à qui pouvoir adresser leur dénonciation. « Nous avons commencé par encourager l’initiative, nos attentes ; il faudrait que la loi qui va être promulguée puisse tenir compte des standards internationaux tels que nous l’avons évoqué tout au long de cette conférence, de façon à ce que les lanceurs d’alerte soient réellement protégés. Il ne suffira pas simplement de pouvoir voter une loi, mais il faudrait s’assurer de son application et son application passera également par la sensibilisation et l’appropriation de cette loi par la population », conclut-il.
Mamadou Sow