La CEDEAO a envoyé une mission de médiation au Mali, ce week-end. La quatrième du genre avec la particularité que, cette fois-ci, aucun Président légalement élu n’est au pouvoir.
La mission de l’organisation sous-régionale a été reçue par les militaires putschistes qui, aujourd’hui, revendiquent une forme de légitimité, celle de mettre fin à ce que certains observateurs appellent ‘’l’impasse institutionnelle’’ dans laquelle le Mali s’était engouffrée.
Les arguments avancés sont ceux des observateurs de matchs de football. Ils ont toujours tendance à donner raison à ceux qui gagnent les matchs même s’ils ont mal joué et fait des erreurs graves.
Eh bien, je ne tomberai pas dans ce piège.
Je suis contre les coups d’Etat et je l’exprime avec force et conviction. Si les Maliens étaient contre Ibrahima Boubacar Keïta, à ce point, il ne fallait pas l’élire en 2013 et le réélire en 2018. Se faisant, ils ont commis l’erreur que les juristes condamnent de tout temps : se prévaloir de sa propre turpitude.
L’erreur sur un président comme l’erreur sur son conjoint dans un mariage, cela se paie cash. On n’en subit les conséquences. Mais, de grâce, il faudra penser à ceux qui n’y sont pour rien.
Le divorce est certes possible mais elle se fait selon des règles précises qu’il faut impérativement respecter même si l’on est pressé. Eh bien, IBK a été répudié tout simplement et débarqué manu militari. C’est en cela que c’est inacceptable. Par la magie du net, je sais que beaucoup de maliens désapprouvent mes analyses sur cette question et l’expriment. Qu’ils sachent que c’est le cadet de mes soucis. Car, je n’ai pas pour vocation de chercher à plaire ou à déplaire dans l’exercice de ce métier.
Et ceux qui écrivent que je roule pour les Chefs d’Etat me lisent depuis peu…
Il y a cependant une vérité sur laquelle nous sommes tous d’accord. IBK n’est pas tombé du ciel. Il a été élu par les maliens. S’il a déçu, on peut le comprendre. Mais que le peuple attente les élections pour le lui montrer. C’est cela le jeu démocratique acceptable. Toute démarche contraire est hasardeuse donc dangereuse. Et il n’y a qu’en Afrique que l’on règle, encore, ces questions de cette manière.
En vérité, il y a quelque chose de gênant de voir les militaires prendre le pouvoir. Eh bien, cela met en sursis tout homme ou femme qui sera appelé à l’exercer. On dirait que l’Armée détient cette var qui permet d’apprécier que le chef d’Etat n’a pas travaillé et qu’il a le pourvoir de le destituer. Ce n’est pas possible.
Malheureusement, avec l’attitude conciliatrice de la CEDEAO au Mali, les pouvoirs d’Alpha Condé et d’Alassane Ouattara sont en sursis.
Bien sûr, il y a beaucoup à dire dans les attitudes de ces Chefs d’Etat surtout en Guinée. Le référendum a posé problème ainsi que les législatives. En Côte d’ivoire, Alassane n’a pas respecté sa parole.
Mais, cela ne doit pas inciter les Armées de ces pays à entrer en jeu.
Certes, la diplomatie est largement en partie faite d’hypocrisie. On ne dit pas toujours ce que l’on pense et on ne pense pas toujours ce que l’on dit.
Mais les journalistes ne sont pas, eux, des diplomatiques. Ils doivent à vérité de rappeler à la CEDEAO ses responsabilités historiques dans le cadre du maintien de la stabilité des Etats.
L’organisation qui a beaucoup fait et qui a mûri doit exercer ses responsabilités sen amont et en aval.
En amont, la diplomatie préventive doit lui permettre de faire pression sur les Présidents qui narguent leurs peuples, versent dans la corruption et tripatouillent les constitutions en les rappelant à l’ordre.
En aval, tout coup de force doit être réprimé avec la dernière énergie.
En clair, si l’on doit transiger avec les principes, on ne s’en sortira jamais. Il y aura toujours un soldat y compris un sous-officier ou un homme de troupe qui va s’autoproclamer Président avec comme seul mérite d’avoir convaincu une partie de l’Armée.
Assane Samb