Le conflit qui oppose l’armée et les mouvements de l’ancienne rébellion indépendantiste risque d’aggraver encore la situation sécuritaire au Mali. De quoi susciter des inquiétudes, tant à Bamako que dans les pays voisins.
Le 19 septembre, au journal de 20 heures, des scènes de bombardement aériens sont montrées aux Maliens. Selon le présentateur de la télévision nationale, il s’agit de la « riposte » des Forces armées maliennes (Fama) à une « attaque terroriste complexe » dans la zone de Léré, à environ 1 000 km au nord de Bamako. Alors que les affrontements se multiplient entre les militaires au pouvoir à Bamako et les anciens rebelles de l’Azawad, l’accord de paix conclu en 2015 n’a jamais paru aussi menacé.
Qui, des mouvements rebelles ou des forces loyalistes, prononcera le premier l’acte de décès de l’accord de paix et de réconciliation d’Alger signé en 2015 par les mouvements indépendantistes touareg et arabes et l’Etat malien ? Le cessez-le-feu, qui surnageait dans un océan de méfiance entre les deux parties, a été sérieusement écorné ces dernières semaines laissant craindre une reprise généralisée des affrontements.
Les derniers combats entre la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA, regroupement des principaux groupes rebelles signataires de l’accord d’Alger) et les forces armées maliennes (FAMa) se sont déroulés le 17 septembre à Léré au sud-est de Tombouctou, près de la frontière avec la Mauritanie. Les combattants de la CMA ont brièvement occupé cette base de l’armée malienne. « Ils ont pris par surprise les FAMa et les ont fait déguerpir en s’emparant au passage d’armes et de matériel militaire avant de se retirer en bon ordre », rapporte un dignitaire touareg, membre d’un autre groupe, joint au téléphone. La CMA a revendiqué avoir abattu, lors des combats, un avion de chasse de type Albatros L-39, l’un de ceux fournis en début d’année à Bamako par la fédération de Russie.
Cinq jours auparavant, les rebelles avaient attaqué un autre camp de l’armée malienne à Bourem. Cette ville stratégique pour les belligérants est située sur un axe transversal est-ouest reliant Tombouctou à Gao, et au carrefour de voies d’accès menant vers Kidal, sanctuaire des rébellions touareg qui, en 2012, proclamèrent l’indépendance de l’Azawad sur le septentrion malien. D’autres combats, dans cette même zone, avaient également eu lieu mi-août pour le contrôle de la base de Ber.
La junte entend reprendre tous les camps de la Minusma après leur évacuation. « La CMA, notamment, s’oppose au déploiement des forces armées maliennes dans les zones qu’elle contrôle », ajoutait le diplomate mauritanien qui s’inquiétait « du grave déficit de confiance entre les parties ». Or, la Minusma vient seulement de clore, le 30 août, la première phase de son retrait en quittant quatre de ses bases : Ménaka, Ogossagou, Ber, Goundam. A l’échelle du pays, l’ONU doit résoudre un véritable défi logistique en six mois : rapatrier 12 947 membres du personnel en uniforme, se séparer de 1 786 personnels civils, réexpédier 5 500 conteneurs maritimes de matériel et près de 4 000 véhicules, selon sa comptabilité. Les Nations unies doivent encore fermer neuf bases, parmi les plus sensibles sur les plans politique et sécuritaire, parce que situées dans les fiefs des mouvements rebelles.
Source: Le Monde