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Mali : la Cedeao maintient la pression sur la junte

La Cedeao a réclamé vendredi un retour rapide à l’ordre constitutionnel après que la junte a octroyé les fonctions de chef d’État au colonel Assimi Goïta.

Au Mali, pas d’amélioration en vue. À la confusion de la situation s’est ajoutée l’incompréhension ce vendredi 28 août alors que la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) s’est réunie pour la deuxième fois en l’espace de dix jours.

La junte veut garder la main

Un texte présenté comme « l’acte fondamental » du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) a été publié au Journal officiel à la date du 27 mais signé du 24 août depuis Kati, la ville garnison d’où est partie la mutinerie qui a abouti au départ du président IBK. Plus inquiétant encore selon ce document de quatre pages, le Comité national pour le salut du peuple (CNSP), institué par les militaires, « désigne en son sein un président qui assure les fonctions de chef de l’État ». En l’occurrence, il s’agit du colonel Assimi Goïta, 37 ans. Le document, reproduit sur les réseaux sociaux, figure toujours sur le site du Journal officiel sans que la junte n’ait apporté de démenti ou de confirmation.

Cet « Acte fondamental N°001/CNSP » dispose que le président du CNSP assume les prérogatives habituelles du chef de l’État jusqu’à l’instauration d’institutions transitoires : il « incarne l’unité nationale », est « garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire » et du « respect des traités et accords internationaux ».

En outre, il « nomme » les responsables civils et militaires de haut rang, « signe les ordonnances et décrets adoptés » du CNSP, et « accrédite » les ambassadeurs étrangers. C’est un « signe évident de l’accaparement du pouvoir d’État » par les militaires, a tweeté l’ancien ministre de la Justice Mamadou Ismaïla Konaté (2016-2017).

« Le timing de la publication est surprenant, alors que les chefs d’État de la région refusent toute légitimité aux militaires », a déclaré à l’AFP le chercheur Ibrahim Maïga, de l’Institut d’études de sécurité (ISS) à Bamako. Selon le texte, « avant l’adoption d’une Charte pour la transition », les dispositions de l’Acte fondamental « complètent, modifient ou suppléent celles de la Constitution » de 1992.

La durée de la transition « c’est douze (12) mois »

Réunis ce vendredi en mode virtuel, les voisins du Mali ont maintenu la pression. Ils ont donné douze mois à la junte pour tenir des élections ramenant les civils à la direction du pays, c’est même l’une des conditions à la levée de leurs sanctions. Le chef d’État nigérien, Mahamadou Issoufou, a demandé en sa qualité de président en exercice de la Cedeao à la junte « d’engager une transition civile immédiatement » et la « mise en place rapide d’un gouvernement pour (…) préparer les élections législatives et présidentielle dans un délai de 12 mois », a-t-il déclaré dans son discours de clôture.

La Cedeao a précisé qu’elle souhaitait la « nomination », pour présider la transition, d’une « personnalité, civile, reconnue (…) pour sa probité intellectuelle et morale », ainsi que d’un « Premier ministre civil ». Elle souligne « qu’aucune structure militaire ne devrait être au-dessus du président de la transition ».

La levée des sanctions conditionnée à la transition civile

Les sanctions prises contre le Mali lors du premier sommet extraordinaire de la Cedeao sur la question le 20 août, deux jours après le coup d’État, « seront levées progressivement en fonction de la mise en œuvre (de ces) décisions », a-t-il dit, alors que la junte plaidait pour la levée des sanctions, à commencer par l’embargo sur les échanges. Des demandes qui sont loin d’aboutir, d’autant plus que la Cedeao a différents motifs d’inquiétude quant à la contestation de la légitimité de certains dirigeants de la région et d’une aggravation de l’instabilité au Sahel.

Lors de son premier sommet par vidéoconférence le 20 août, elle a dénié toute légitimité aux putschistes et ordonné la fermeture des frontières de ses États membres avec le Mali, et stoppé tous les flux financiers et commerciaux. Le président de la Cedeao n’a pas évoqué spécifiquement une autre disposition prise le 20 août, la suspension du Mali de tous les organes de décision de la Cedeao. L’embargo commercial et financier préoccupe les colonels nouveaux maîtres de Bamako, tant la population de ce vaste pays enclavé a un besoin vital d’échanges.

Le président en exercice de la Cedeao a tancé à l’ouverture du sommet les militaires pour leur refus de rentrer dans leurs casernes, et défendu le principe général de sanctions contre les putschistes. « Pour un pays, le putschisme est une grave maladie. Pour en guérir, une seule ordonnance : les sanctions », a-t-il déclaré. La junte « refuse de regagner les casernes alors que le pays est en guerre, ce qui exige, plus que jamais, que l’armée se concentre sur sa mission traditionnelle », a-t-il dénoncé en faisant référence à la propagation djihadiste. L’ennemi cherche justement « à exploiter le vide institutionnel actuel », a-t-il mis en garde. La Cedeao se réunira de nouveau le 7 septembre prochain dans le cadre d’un sommet à Niamey au Niger. Au programme : le point sur l’évolution de la situation au Mali et l’opportunité des sanctions en vigueur.


Avec LePoint Afrique

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