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Le Joola : 18 ans après : Une responsabilité pénale non-située, des leçons non-tirées

18 ans déjà ! Le naufrage du bateau le Joola aux larges des côtes gambiennes ce 26 septembre 2002 avait fait plus de 1800 morts. C’est donc l’une des catastrophes les plus meurtrières de l’histoire de l’humanité.

Une conjonction de facteurs naturels, techniques et humains ont abouti au naufrage. La tempête était forte et les passagers se sont versés d’un côté ce qui a précipité la chute d’un navire qui s’est renversé, emporté avec lui de nombreux sénégalais et des citoyens du monde.

Mais, il y avait surtout les prédispositions qui ont fait la catastrophe était logique. Pour un bateau conçu pour avoir 550 passagers, il en avait pris trois fois plus, soit près de 2 mille.

Les bagages dont des voitures n’étaient pas correctement arrimés et le bateau fonctionnait avec un seul moteur. En plus, un seul ou deux canots de sauvetage ont fonctionné pour un bateau de cette envergure.

Toutes les conditions étaient réunies pour une catastrophe qui a fini de traumatiser des centaines de familles.

Pis, le dossier a été classé sans suite, pour ce qui est de la responsabilité pénale et de l’Etat et de différents individus au niveau de la chaîne de responsabilité.

Le Capitaine du navire bien sûr, Diarra, mort dans le naufrage et son personnel d’appui. Mais, ceux-là travaillent selon une chaine hiérarchique claire. Et il était difficile de faire admettre que la hiérarchie n’était pas au courant des pratiques en cours dans le bateau, notamment la surcharge.

Ainsi, il n’est pas difficile d’établir la responsabilité directe de ceux qui avaient en charge le bateau au-delà du Capitaine et de son équipage selon un lien d’imputabilité formel.

Mieux, la Marine marchande qui en avait la responsabilité de l’exploitation pouvait également être attaquée pour non-assistance à personnes en danger. Les secours sont arrivés très tard le lendemain au moment où il n’y avait pratiquement rien à faire.

En clair, c’est tout le système de gestion du navire qui a failli engageant la responsabilité aussi bien pénale que civile de l’Etat et de ses agents d’une façon solidaire et collective.

L’Etat a ainsi reconnu sa responsabilité pénale tout en classant le dossier sans suite dès 2003 en évitant toute forme de poursuite pénale contre un quelconque responsable. Seconde faute, après, celle originelle de laisser s’installer l’anarchie dans la gestion du bateau.

Cette prouesse, inacceptable a été possible du fait de l’opportunité des poursuites qui est laissé au Procureur et du fait que ce dernier travaille sous la tutelle du Ministère de la Justice selon le principe d’hiérarchie auquel il est soumis.

Mais, à lui seul, aucun Procureur n’aurait classé sans suite un dossier aussi grave avec des responsabilités aussi flagrantes.

Il y avait donc la main invisible du Président de la République de l’époque qui sait qu’avec des poursuites, les choses peuvent aller loin, c’est-à-dire incriminer de hauts responsables.

Malheureusement, au Sénégal, dans les dossiers judiciaires sensibles, on ne s’attaque en général qu’aux seconds couteaux.

On l’a vu dans l’assassinat de Me Babacar Sèye, dans celui de Fatoutama Ndiaye, etc. Les vrais coupables, les instigateurs qui sont des complices aux yeux de la loi échappent souvent à la Justice pour des raisons liées à des accointances avec les pouvoirs.

Certes, l’Etat a indemnisé les victimes à hauteur de 10 millions chacun, mais l’argent ne soigne pas toutes les plaies.

Il faudra travailler à renflouer le navire, à construire la stèle en mémoire des victoires et à davantage s’occuper des familles surtout les enfants qui certes ont grandi, mais ont besoin de la tutelle de l’Etat.

Pis, les leçons n’ont pas non plus été tirées. Et ça, c’est largement de la responsabilité des citoyens.

C’est reparti de plus bel. Rien que sur les routes, nous faisons plus de 600 morts par ans. Les comportements à risque sont quotidiens et tous ceux qui sortent de chez eux sont en danger dans une République d’insouciance.

Face à la pandémie à coronavirus, on a pu constater à quel point, nos compatriotes étaient insouciants et désinvoltes. On brave le danger en pensant que cela n’arrivera qu’aux autres.

Le Joola, malgré son lot de sacrifices humains, n’a servi à rien. Comme une fatalité, les citoyens bravent la mort dans une insouciance maladive face à un Etat qui peine à prendre ses responsabilités.


Assane Samb

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