Daté de 146 000 ans, le fossile quasiment intact est attribué par les chercheurs chinois à une nouvelle espèce sœur de la nôtre. D’autres considèrent qu’il pourrait s’agir d’un homme de Denisova, connu jusqu’ici essentiellement grâce à son ADN.
En 1933, à Harbin, dans le nord de la Chine, un entrepreneur en travaux publics déterre un crâne lors de la construction d’un pont pour le compte des Japonais, qui viennent d’envahir la Mandchourie. La découverte, quelques années plus tôt, de l’« homme de Pékin », constitué d’une série de fossiles préhumains, ayant fait grand bruit, il se dit que la trouvaille a du potentiel, et décide de cacher le fossile à l’occupant, dans un puits abandonné.
Avec l’arrivée au pouvoir des communistes, après la guerre civile, l’entrepreneur préfère faire profil bas sur sa coopération avec les Japonais, et retourne aux travaux des champs sans jamais récupérer son trésor. Trois générations plus tard, il livre son secret, peu avant sa mort, à ses descendants, qui décident de repêcher le fossile en 2018. Un paléontologue de l’université de Pékin, Qiang Li, a alors vent de l’affaire et persuade la famille restée anonyme de faire don du spécimen au musée de l’université Geo du Hebei.
Cette belle histoire est aujourd’hui contée par les chercheurs qui ont pu étudier le fossile, et le décrivent dans trois articles dans la revue The Innovation (groupe Cell Press) du 25 juin, sous le nom d’« homme dragon ». Il faut dire qu’il a de l’allure : daté de 146 000 ans environ, il présente un état de conservation extraordinaire.
Pour une partie de l’équipe qui l’a étudié et décrit, le fossile est le représentant d’une nouvelle espèce, sœur de la nôtre, qu’il a nommée Dans un plus. Chris Stringer, du London Natural History Museum, est co-auteur de deux L’innovation, mais pas celui où ses confrères chinois proposent ce nom : « Dans un plus est un grand nom, et je suis très heureux d’utiliser ce nom populaire de l’homme dragon“. Mais à mon avis, ce fossile de Harbin pourrait aussi bien s’appeler homme daliensis, tant que ce nom est prioritaire. “