Le groupe chinois Huawei a cédé ses brevets sous licence à plus de vingt groupes en 2022, dont plusieurs géants de l’automobile. Le champion des télécoms espère ainsi compenser une partie du chiffre d’affaires perdu à cause des sanctions américaines.
C’est l’une des facettes du « mode survie » enclenché par Huawei depuis les sanctions américaines. Pour retrouver du chiffre d’affaires, le géant chinois des télécoms vend de plus en plus ses technologies sous licence à d’autres groupes, notamment dans l’automobile. Une façon pour lui de valoriser sa recherche et développement (R&D), alors que le groupe est un poids lourd dans le domaine, avec 110.000 brevets à fin 2021.
En 2022, Huawei a ainsi signé ou renouvelé plus de 20 accords de ventes de brevets sous licence, selon les derniers chiffres. Sur ce total, 15 concernent l’automobile et notamment Mercedes-Benz, Audi, Porsche, BMW mais aussi Renault ou Suzuki. Autant de constructeurs qui pourront utiliser les technologies de Huawei, notamment dans le logiciel, pour leurs véhicules.
Mais Huawei n’oublie pas son coeur de métier pour autant. Le groupe a renouvelé son accord signé en 2017 avec Nokia, son rival sur les équipements télécoms. Sur les smartphones, il a également conclu début décembre un accord mondial de licences croisées avec le chinois Oppo, qui couvre notamment les brevets 5G. Au total, la vente de brevets aurait rapporté 1,2 milliard de dollars à Huawei entre 2019 et 2021, selon le groupe. Les chiffres 2022 n’ont pas encore été publiés.
Certes, la commercialisation de brevets est une pratique courante dans le monde de la technologie et notamment des télécoms. Nokia et Ericsson en ont aussi fait une part non négligeable de leur business. Mais cette activité est devenue encore plus critique pour Huawei après les sanctions américaines de 2019, quand Donald Trump occupait encore la Maison-Blanche. Dans la foulée, suivant les pressions de Washington, de nombreux pays anglo-saxons ont exclu Huawei du marché de la 5G. Fonte des revenus en 2021.
Et sur le marché du smartphone, le groupe n’est plus que l’ombre de lui-même. L’impossibilité de s’approvisionner auprès de ses traditionnels
fournisseurs américains a été un coup fatal pour ses activités hors de Chine. Huawei ne détient plus que 2 % du marché du mobile, selon Strategy Analytics, alors qu’il avait réussi momentanément à doubler Apple pour devenir le deuxième fabricant mondial derrière Samsung. En 2021, ses revenus
ont fondu d’un tiers, à 91,4 milliards de dollars, même s’il reste très rentable avec un bénéfice net en hausse de 76 % à environ 16,3 milliards de dollars.
Dans ce contexte, Ren Zhengfei avait signalé dès 2019 son intention d’accélérer dans la vente de brevets. Le fondateur de Huawei n’excluait pas alors de vendre ses brevets 5G à un rival occidental. Une façon pour lui de « soulever le capot » au moment où le groupe était régulièrement accusé d’être le cheval de Troie de Pékin. Puis en 2021, Huawei a à nouveau réaffirmé sa volonté de vendre davantage de brevets. De la matière grise, Huawei en a à
revendre. Le champion chinois des télécoms a investi plus de 19 milliards d’euros en R&D en 2021, soit plus de 22 % de son chiffre d’affaires. « Après plus de vingt ans d’innovation continue, Huawei a développé plusieurs portefeuilles de brevets de grande valeur sur le marché mondial dans des domaines tels que la 5G, le wi-fi et les codecs audio/vidéo », expliquait récemment Alan Fan, chef du département pour la propriété intellectuelle de Huawei.