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Difficultés des travailleurs, Médiation Sociale: Mody GUIRO sans langue de bois

Connu pour être un fervent défenseur des travailleurs, Mody GUIRO est le secrétaire général de la Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (Cnts). Invité à l’émission ‘’Grand oral’’ sur Rewmi Tv, il a passé en revue  les difficultés que traversent bien des secteurs avant d’appeler à l’unité. Et, pour une meilleure prise en charge des questions syndicales et des préoccupations des travailleurs, il a plaidé pour la médiation sociale. 

Comme chaque année, la journée internationale du travail a été célébrée le 1er mai dernier, à travers notamment la traditionnelle remise des « Cahiers de doléances »  au chef de l’Etat. Malgré tout, Mody Guiro a déploré les conditions dans lesquelles se trouvent les travailleurs. Référence dans le monde syndical, le secrétaire général de la Cnts a rappelé que  « l’environnement global est touché ». Mais, surtout, déplore-t-il,  « les travailleurs restent éprouvés et fatigués dans un contexte où la vie est chère et les salaires stagnent bien que l’état ait fait des efforts dans le secteur public ». Selon l’invité du ‘’Grand oral’’, des pans ont été « oubliés » dans le secteur de la santé et dans le secteur primaire notamment.

A ce titre, il rappelle que des « décisionnaires » attendent de l’État des signaux forts et des mesures visant à atténuer cela. Avec Diomaye à la tête du pays, Mody Guiro note que tout est priorité. «  Le gouvernement a reçu les partenaires sociaux que nous sommes et la première rencontre est un geste de considération à notre égard. Nous lui avons soumis les doléances des travailleurs. Et nous sommes des citoyens et responsables. Le Pacte social est important et apaise  l’environnement global et que l’état envoie des signaux forts», a rappelé Mody Guiro. Le tout dans le but d’établir ce climat de confiance. 

Le sens des « Cahiers de doléances »

Revenant sur la fête du 1er mai où les cahiers de doléances sont « traditionnellement » déposés, le patron de la Cnts précise qu’ils ne garantissent pas une prise en charge effective de toutes les difficultés rencontrées par les travailleurs. Selon Mody Guiro, les travailleurs  sont menacés et ces derniers risquent d’être au chômage car menacés par certains patrons. « On met dans les cahiers des revendications transversales. Le niveau de vie, la sécurité, la fiscalité, entre autres. Des questions qui reviennent chaque année car tant qu’il existera des patrons qui ont le capital et des travailleurs qui ont la force de travail, il y aura des revendications et des contestations. C’est ce qui amène toutes ces revendications», a-t-il précisé.

Et de laisser entendre que « les syndicats se battent au quotidien » pour les travailleurs en donnant l’exemple de ceux de Savana dont 200 risquent de se retrouver dans la rue. « Nous les accompagnons tous les jours ; les syndicats les aident et les accompagnent. Notre rôle est d’intervenir et de montrer la voie en cas de difficulté ». Sur un autre registre, le leader de la Cnts rappelle que les travailleurs courent souvent derrière des contrats de travail et sont souvent dans des contrats de prestation pendant plusieurs années. Articulés à l’absence de cotisation, cela gonfle encore la liste de tous les maux qui gangrènent le bien être des employés. A la question de savoir si ces problèmes sont pris en compte par les centrales syndicales, Mody Guiro souligne que les syndicats ont une responsabilité. 

Dans un pays où « la sous-traitance est devenue la règle », il invite les autorités à trouver des solutions. «  Ce que nous pouvons c’est nous battre. Et, avec la responsabilité des chefs d’entreprise qui doivent se conformer. Il faut que les travailleurs se rapprochent des syndicats et (qu’ils) aient la volonté. Je vous donne le cas de la Senelec, avec 600 travailleurs dans la précarité mais une fois à la Cnts nous nous sommes battus pour obtenir gain de cause car la chose est remise sur la table à travers des négociations avec la direction. Je peux donner l’exemple des travailleurs de l’autoroute  ‘’Ila Touba’’  qui étaient dans une précarité mais nous nous sommes battus pour qu’ils soient régularisés », a-t-il révélé. Revenant sur le secteur de l’hôtellerie, l’invité du ‘’Grand oral’’ a invité l’Etat à jouer son rôle quand il met en avant des moyens de financement et que des gens refusent d’aller vers la direction fixée. « La division affaiblit la lutte syndicale. Ce que nous pouvons, c’est faire de la pression. Car on ne peut pas faire le travail à leur place. Au King Fadh Palace, il y a plusieurs syndicats. L’idéal c’est d’avoir une convergence de vues », a-t-il encore révélé.

Pour Mody Guiro, il est nécessaire de créer les conditions de travail optimales pour que les travailleurs soient dans les dispositions idoines et pour un respect de leurs droits. A ce titre, il dit appeler l’Etat à « prendre ses responsabilités » pour plus de protection des travailleurs. Interpellé sur le fait que des travailleurs se tournent de plus en plus vers des activistes pour porter leurs revendications, Mody Guiro est d’avis que les syndicalistes sont dans leur rôle et font leur travail avec responsabilité. Pour lui, l’activiste à son rôle, mais il y a une différence.

La formation : l’épineuse question des centrales syndicales 

Dans les centrales syndicales la formation est un point important. A ce sujet le Sg de la Cnts a argué que : « qu’un délégué ou un responsable mal formé est une catastrophe, une bombe pour l’entreprise. » Formé sous l’aile de Madia Diop, Mody  Guiro souligne que le fait d’avoir des connaissances sur des questions syndicales est important afin de mieux défendre la cause des travailleurs. D’où le concept de négociation qui est un art. « Les chefs d’entreprise doivent savoir qu’un délégué bien formé peut aider l’entreprise. C’est le cas pour le dialogue social aussi. Des gens sont dans des foules mais restent des ignares. C’est dangereux. Il faut un volet dans le budget de l’entreprise pour la formation », plaide-il. 

Le jeu de la concurrence entre les centrales syndicales 

Le Sénégal compte une vingtaine de centrales syndicales. Ce qui occasionne souvent une certaine concurrence entre elles. Rappelant que seule la Cnts a déclenché une grève générale sous le magistère de Wade, Mody Guiro regrette la « perte » de certaines valeurs syndicales occasionnée par la posture de certains qui font du syndicalisme un « fonds de commerce ». « C’est un problème », dit-il avant de mettre en relief le fait que certains, sur la base de leur positionnement politique et avec des soutiens politiques, sont arrivés à diriger des syndicats. Interrogé sur sa longévité syndicale à la tête de la Cnts, Mody Guiro constate que c’est à lui seul que les journalistes posent cette question. « Nous avons des camarades qui sont capables de diriger. Des cadres syndicaux qui sont là et qui peuvent vraiment faire le travail » a-t-il reconnu, ajoutant que « le vent du renouveau a soufflé en 1981, avec feu Madia Diop. « On était dans des pays pour être formé, pour des visites d’études etc. Nous avons vu, vécu et respecté (la Cnts). Des gens qui parlent n’ont pas été délégués et qui ne connaissent rien ». 

 

Redynamisation la renaissance des entreprises fermées 

 

Sur ce point Mody Guiro souligne « qu’il faut faire très attention ». C’est le cas des industries chimiques du Sénégal (Ics) qui ont traversé des difficultés. D’où le partenariat avec l’Inde pour récupérer la production d’acide phosphorique pour sauver l’entreprise. Il fallait des politiques d’économie et des cadres sont mis en avant pour sauver l’entreprise grâce à l’engagement de tous. Malgré tout, le président Abdoulaye Wade avait décidé de fermer les Ics, il mettait en avant le fait qu’ils ne payaient pas d’impôts. 2000 travailleurs avec plus de 22 milliards de sous-traitants. Selon le syndicaliste, « des solutions mises en avant doivent être réfléchies sachant que des crises peuvent surgir à tout moment ». Plaidant la relance du chemin de fer, il estime que la Sotiba doit également être relancée. Mais en amont, il faut réussir la culture du coton. « Nos marchés sont inondés par des produits venant de la Chine ; il faut aussi être compétitif et réfléchir sur des études de marché. Consommons ce que nous produisons car il le faut», a suggéré Mody Guiro.

 

Réforme de la justice 

 

A l’initiative du chef de l’Etat, Bassirou Diomaye Faye, la thématique sur les réformes de la justice sera débattue à l’occasion de la journée nationale du dialogue sociale, prévue ce mardi à Diamniadio. Il va réunir les forces vives de la nation. Pour le leader de la Cnts, il faut penser aux réformes sur la dimension sociale avec la redynamisation des tribunaux du travail qui doivent être dotés de personnel et d’effectifs ainsi que de moyens. « Il y a les lenteurs de la justice. Quand on est en désaccord avec son employeur, le conflit peut durer et il faut évacuer ces dossiers. Les travailleurs ont des difficultés et pour éviter cela, il faut la médiation sociale. Des pays le font et dire que parmi les retraités on peut trouver des gens compétents avec une liste et la mettre à la disposition des inspecteurs du travail en cas de non accord et aller vers un médiateur social», préconise-t-il. Enfin, revenant sur le magistère du président Macky Sall, avec les nombreuses grèves, Mody Guiro a  évalué le Pacte de stabilité sociale qui selon lui, a toute son importance parce qu’ayant servi à « atténuer les tensions » bien que des points n’ont pas été épuisés avec le trop pleins de revendications. Mais, dit-il, « il fallait voir les opportunités et faire des pas de géants ».  

« L’Etat de grâce » du nouveau régime

Sur ce point le syndicaliste pense qu’il faut « être honnête ». Car, il faut laisser au nouveau régime le temps de s’installer, de consulter les dossiers. Pour Mody Guiro, « l’état de grâce c’est normal et (il faut)  éviter de faire de la démagogie bien que les problèmes existent ». Selon lui, le président Bassirou Diomaye Faye « a besoin de respirer (même si) la priorité c’est l’amélioration du pouvoir d’achat ».

MOMAR CISSE 


 

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