La situation était confuse hier, à Bissau, jusqu’au moment où nous mettions sous presse. Une tentative de coup d’Etat était en cours. Et les informations à la disposition des médias étaient encore confuses.
L’Onu déplore les combats et la Cedeao dénonce une tentative de coup d’Etat. Une situation regrettable avec une seule certitude, c’est que le pays renoue avec l’instabilité. Alors qu’elle y était déjà chronique avant l’arrivée de Embalo. Car, faut-il le rappeler, la Guinée-Bissau, n’a cessé, durant son histoire, d’être traversée par des coups de force surtout avec l’assassinat d’hommes politiques comme Nino Vera.
Elle ne doit sa relative stabilité avant l’arrivée d’Embalo en 2012, qu’à la présence des soldats de la Cedeao dans le cadre de la mission de l’Ecomib.
Sa mission terminée en septembre 2020, les soldats sont partis au moment où les tensions politiques ont semblé s’apaiser. Mais ce n’est là que l’arbre qui cache la forêt. La réalité est que les forces de l’instabilité et de la division étaient encore tapies dans l’ombre. Et elles n’attendaient que la première occasion pour agir.
Et cette occasion, elle est fournie par la série des coups d’Etat observée actuellement au Mali, en Guinée et au Burkina Faso. Une bonne partie de l’armée favorable au Président du PAIGC, Domingo Simoes Pereira exilé au Portugal s’est dite que c’est le moment où jamais d’agir.
Tous les militaires qui n’osaient pas et qui rêvaient de prendre le pouvoir ne vont plus hésiter en Guinée-Bissau ou ailleurs. La Cedeao n’a pas su préserver les acquis en se faisant respecter.
Le seul problème, c’est que le Président Embalo, un Général de l’Armée, ne va pas, lui aussi, se laisser faire facilement. Et c’est cela qui a causé la confusion observée jusqu’à tard hier.
Connaissant son pays et l’état d’esprit de ses adversaires et même ennemis, il a dû prendre les devants et mettre des garde-fous. Le contraire serait étonnant.
En clair, tout cela veut dire que si la Guinée-Bissau entre dans une nouvelle ère d’instabilité, c’est toute la sous-région qui va en pâtir car elle n’en sortira pas facilement. Car, c’est déjà un pays à problème. Et ça, c’est un secret de polichinelle.
Car, ne l’oublions pas, c’est une coalition qui a porté le Président Umaro Sissoco Embalo au pouvoir. Et ce dernier a tissé des liens au niveau de toutes les instances du pays. Et ces présumés putschistes, même s’ils réussissaient leur coup, n’auront jamais le soutien de la population comme on a pu le voir ailleurs. Parce qu’il n’y a, en Guinée-Bissau aucune raison crédible de stopper le processus de démocratisation si ce n’est le désir exprimé par certains depuis longtemps, d’évincer qui serait, selon eux, mal élu.
Dans tous les cas, Embalo ne sera pas facilement renversé.
Aujourd’hui, c’est la Cedeao qui a de gros soucis à se faire. Car, pratiquement tous les Etats de l’Afrique de l’Ouest sont en sursis. Et personne ne sait à qui le tour. Il est important cependant que des Etats comme la Mauritanie et le Niger surveillent leurs arrières…
Qu’à cela ne tienne, c’est parce que l’on a mal géré le premier coup de force au Mali contre IBK que la situation a dégénéré en Afrique de l’Ouest au point que la sous-région est devenue la risée du monde entier.
Encore une fois, les militaires n’ont pas pour rôle de diriger les pays ou de sauver qui que se soit si ce n’est en tant de conflit.
Aucun pays ne se développera parce qu’il y a eu un coup d’Etat. Et les armées gagneraient à être davantage républicaines. Et s’il y a des soucis au niveau de la gestion des Etats, les électeurs pourront s’en charger. Mais renverser des présidents légalement élus n’est qu’une façon d’installer durablement le chaos dans ces jeunes nations encore fragiles.
Assane Samb