La crise diplomatique actuelle est aiguë entre la France et le Mali depuis le discours du Premier Ministre Chouguel Maïga, à la tribune des Nations-Unies, accusant l’ancienne puissance coloniale ‘’d’abandon en plein vol’’. Maïga avait ajouté que son pays « regrettait l’absence du principe de la concertation entre les partenaires qui avait été ignoré lors de la prise de la décision » jugeant le retrait français du Mali.
Plus grave, il a estimé que le mali se retrouve ‘’seul’’ face à son sort accusant surtout la France d’avoir ‘’abandonné’’ son pays.
La réplique de la France a été sans appel. Les mots utilisés par la Ministre française des Forces Armées Florence Party, ont été peu diplomatiques.
Elle a déclaré, devant le Sénat français, que ‘’si le Mali établissait un partenariat avec les mercenaires, il perdra l’appui de la communauté internationale à son endroit et hypothéquera par la même des pans entiers de sa souveraineté’’.
Et devant les étudiants de l’Institut des sciences politiques de Paris, ce mercredi, elle a jugé les propos de Maïga ‘’d’inacceptables et d’irresponsables’’ avant de qualifier le Chef de gouvernement malien « d’hypocrites et de mauvaise foi ».
Elle, a ce propos, expliqué que son pays n’est pas en train de se désengager du Mali même s’il y a eu des retraits et des redéploiements qui ont été faits. Mais, si l’on n’en juge par le ton des propos entretenus, on peut penser que cette crise diplomatique est profonde et reste symptomatique de l’évolution de la Françafrique avec l’avènement de nouveaux responsables dans le continent dont l’objectif est justement de s’affranchir de l’emprise de l’ancienne puissance coloniale.
Le fait que le Mali se rapproche de la Russie, n’est pas nouveau. On sentait depuis la période de l’ancien Président Ibrahima Boubacar Keita, que beaucoup de maliens, qui ont eu à organiser des manifestations, se doutaient de l’efficacité de l’intervention française dans leur pays et n’ont pas hésité à demander l’intervention de la Russie. Et les militaires maliens au pouvoir, n’ont fait que répondre à cette doléance en reconnaissant le fait de chercher des alliés ailleurs même s’ils ont évité de parler de Wagner, un groupe qui n’est pas officiellement reconnu en Russie.
En tout état de cause, depuis le second coup d’Etat perpétré au Mali par le Colonel Goïta et ses hommes, on a senti un certain dégoût de la France qui, manifestement, n’est plus enthousiaste à intervenir au Mali. Elle a semblé se retirer tout en restant. Une position qui n’a fait qu’attiser les suspicions à Bamako et à pousser les nouvelles autorités à prendre leur responsabilité.
En clair, on tend vers la rupture de ses relations même si la France ne souhaite nullement abandonner son allié aux mains de la Russie, comme cela a été le cas en République centrafricaine.
Il s’y ajoute que les groupes au Nord comme le Mujao ou Ansardine n’ont aucune envie de voir la Russie débarquer et n’ont pas manqué de le faire savoir. C’est pourquoi, les nouveaux dirigeants du Mali ont fait une analyse froide du contexte géopolitique et se sont, sans doute, inspirés de l’exemple d’Idriss Déby dans ses relations parfois ambiguës avec la France. Parce qu’elles savent que ce pays aura du mal à lâcher le Mali ne serait-ce que parce qu’elle ne veut pas laisser le terrain à d’autres puissances alors qu’elle s’est beaucoup donnée à le faire sécuriser.
Un bras de fer qui manifestement, donne le ton de la nouvelle forme de relation que la France aura désormais avec de nombreux pays africains. Car, il est difficile de continuer à entretenir cette forme de coopération néocoloniale, anachronique, qui a les allures de tutelle.
Il faut laisser les pays grandir et choisir avec qui ils veulent coopérer dans la dignité et le respect des intérêts des uns et des autres.