C’est le bras de fer entre le Mali et la CEDEAO, suite, aux dures sanctions prononcées ce dimanche par la Cedeao et la réaction subséquente de la junte militaire de rappeler leurs ambassadeurs et de fermer les frontières avec les pays concernés. Bien entendu, d’ici vendredi, d’autres mesures sont attendues notamment le fait pour ce pays, en proie à une insécurité et à une instabilité institutionnelle, de quitter la Cedeao.
La tension est très vive au sein de l’espace de la Cedeao après celle qui a opposé ce pays avec la France qui, pourtant, a perdu une cinquantaine de soldats dans l’intervention au Mali. Les bisbilles avec la Cedeao sont nées après que les militaires au pouvoir au Mali aient décidé de prolonger la transition de cinq ans suite à une conférence nationale en décembre, boycottée par beaucoup d’organisations politiques. Cà été l’erreur de la junte au pouvoir au Mali. On ne peut pas proposer une transition de cinq ans, après avoir promis une élection février 2022. La Cedeao ne pouvait pas accepter cela. Car, l’enjeu fondamental pour elle est justement d’éviter que cela n’encourage d’autres comme en Guinée de faire de même.
Et l’organisation n’a nullement envie d’encourager les coups d’Etat mais surtout de paraître amorphe, face aux pressions de ceux qui ont pris le pouvoir par la force. Toutefois, elle a exagéré dans ses sanctions. En effet, face à l’exagération des militaires sur la période de transition, la Cedeao a opposé un autre excès : le caractère trop dur des sanctions opposées.
Aujourd’hui, le Mali est sous embargo total, ce que l’économie du pays aura du mal à supporter. Toutefois, le résultat qui va en découler sera à l’opposé de ce qui est escompté. Au lieu d’une révolte des populations contre la junte, il y a aura davantage de radicalisation du peuple malien, plus de sentiment antifrançais et anti-Cedeao. Le Mali va se recroqueviller sur lui-même et va ouvrir d‘autres corridors de relations notamment avec la Mauritanie, l’Algérie et la Turquie en plus de la Russie et de la Chine. Et des pays comme le Sénégal vont bien sûr en pâtir de cette situation du fait justement des relations commerciales entre les deux voisins.
Face à une telle situation qui n’augure rien de bon, il est important pour une organisation comme l’Union africaine, d’entrer en jeu. En effet, il faut un médiateur de taille face à ce que nous appelons la guerre des extrémismes entre le Mali et la Cedeao. Il est important que chaque entité lâche du lest pour revenir à une situation acceptable pour tous dans l’intérêt supérieur du peuple malien. D’ailleurs, les nouvelles autorités maliennes offrent l’opportunité à un pays comme la France de se désengager dans un conflit où elle s’enlisait. Elle devait en tirer toutes les conséquences et savoir que l’on n’aide pas quelqu’un contre son gré.
Et qu’en définitive, c’est au peuple malien de décider de son sort. Partant, l’accompagnement de la Cedeao au retour à un ordre constitutionnel ne saurait occulter les enjeux géostratégiques dans ce pays. Et la Cedeao ne doit jouer le jeu d’aucune elle. C’est pour cette raison que seule l’Union africaine peut intervenir pour jouer à une sorte de médiation et faire revenir la paix. Car, cette situation ne saurait perdurer. Le Mali a trop longtemps souffert d’instabilité et d’insécurité et que l’embargo va sonner comme l’estocade qui va l’achever. Il est important aujourd’hui que la communauté des Nations vienne au secours du Mali comme elle l’a fait quand les djihadistes gagnaient du terrain.
Le pays, cette fois-ci, a été frappé dans sa fierté nationale et sa réaction sera celle de la résistance. Et si on la laisse s’inscrire dans cette dynamique, il va couler. Et c’est ce qu’il faut éviter.
Assane Samb