La mort de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) a été actée hier à l’Assemblée nationale. Elle sera remplacée par un Pool judiciaire financier avec ses juges d’instruction, ses chambres, sa cour d’appel, etc. Ses compétences en matière de criminalité économiques et financières seront très importantes à en juger par la réaction du Forum du justiciable. Pour notre part, nous attendons d’en savoir un peu plus. Qu’à cela ne tienne, il est heureux que la Crei disparaisse.
Et nous n’allons pas la regretter. Pour cause! Voilà une juridiction dont les pouvoirs publics ne se rendent comptent de sa dangerosité que si elles sont traduites devant elle. C’est pourquoi nous n’allons pas la regretter. Car, la Crei, telle qu’elle a été conçue est un arsenal judiciaire auquel il est difficile d’échapper, est une lourde machine de guerre judiciaire. Certes, le délit d’enrichissement illicite qui a été ajouté en son temps dans le code pénal légitimait la réactivation de cette cours. Mais comme dans les années 80, elle a jugé deux à trois personnes. Cela ne fait pas plus de six personnes en trente ans.
Pis, elle ne mérite pas tout le tintamarre qu’elle suscite, les moyens financiers, humains et matériels mis en place. Elle apparaît d’ailleurs beaucoup plus comme un instrument insidieux de chantage et de répression politique contre des opposants. Et techniquement, elle viole pas mal de principes sacro-saints du droit pénal. Le premier principe remis en cause par la Crei et la charge de la preuve qui relève de l’accusation. Ici, c’est la personne poursuivie qui doit prouver l’origine licite de ses biens ou justifier de son train de vie.
Le second principe violé est le double degré de juridiction. Il n’y a pas d’appel pour les décisions de la Crei. Pis, les droits de la défense ne peuvent pas alors être garantis. Toutes choses qui font que nous avons toujours dénoncé l’existence de la Crei. Ce n’est d’ailleurs pourtant pas un hasard si depuis 30 ans, elle n’avait jamais été réactivée jusqu’à l’arrivée du Président Sall. Sa décision de le faire a été une grave erreur. Car cela a entaché à jamais son magistère car il sera difficile de faire oublier aux sénégalais cette liste de personnalités dont la plupart ont dû transhumer pour échapper aux poursuites.
Et le procès de Karim Wade, son emprisonnement et son « exil » au Qatar ont été des abus graves de justice et une entorse aux droits d’un citoyen.
Nous pensons en effet que si l’on ne reproche aucun acte de gestion à un haut cadre de l’Etat encore moins un acte de corruption, de détournement ou délits assimilés, on doit le laisser tranquille. Il était heureux alors que la Crei disparaisse à jamais de notre arsenal judiciaire.
Assane Samb