Le Lac Rose situé à proximité immédiate de Dakar est entrain de perdre sa couleur d’antan. Elle n’est plus rose et ceci risquerait d’avoir des conséquence sur le tourisme qui bat de l’aile, menaçant les milliers d’activités connexes. Ce lac d’environ 3 km², avec une profondeur faible (6 mètres) avec ses eaux salées et une teinte rose (souvent suivant des périodes de l’année) en raison de la présence d’une algue microscopique est soumis aux fortes pressions naturelles et anthropiques, servant notamment de déversoir des eaux pluviales et usées. Entrainant des changements sur son écosystème.
Les stigmates des fortes pluies enregistrées l’hivernage dernier, sont encore visibles. Les abris de fortune aménagés et deux bâtiments sont sous les eaux. Les propriétaires de restaurants attendent que l’on débarrasse leur lieu de commerce des eaux pluviales. Afin de reprendre leurs activités. En somme, c’est une bonne partie du site qui est littéralement envahie par les eaux. Site touristique, le Lac Rose, du nom de l’ex-Lac Rëtba qui doit son nom à la couleur de ses eaux, se meurt. Et le tourisme avec.
A l’origine, le débordement du Lac. Les eaux offrent un décor pas du tout agréable à voir. A certains endroits, on constate la présence des flaques d’eau. Beaucoup de marchands des objets d’art (antiquaires) ont été contraints d’abandonner leurs cantines. «Il est impossible de récupérer ces terres, submergées par les eaux du Lac. Nous avons rempli des sacs de sable pour les poser par terre, afin d’éviter que l’eau ne pénètre dans nos cantine. En vain. L’augmentation du niveau du Lac n’a pas permis de bloquer les eaux.»
LES CLIENTS POUR LES BALADES RARES, LES PIROGUIERS SE TOURNENT LES POUSSES
Les baignades ne sont plus prisées. Les risques de noyades sont inexistants. Même ceux qui ne savent pas nager ne courent aucun risque. Ils peuvent plonger à n’importe quel endroit, flotté à la surface de l’eau. D’ailleurs, un habitué des lieux, ironise : «vous pouvez prendre votre livre, le lire couché sur l’eau. Vous n’allez jamais descendre en profondeur.» Sauf qu’en juin 2022, une séance de baignade avait viré au drame au lac Rose. Quatre (4) candidats au BFEM y sont morts noyés. Alors qu’ils y ont organisé une sortie, pour se baigner, juste après avoir subi leurs épreuves physiques du BFEM.
A l’embarcadère, situé à quelques mètres des cantines des antiquaires, les piroguiers, pour garer leurs embarcations, se servaient des deux poteaux en bois. Pour attacher leurs pirogues. M. Mbaye, un piroguier, explique : «Auparavant, on amarrait nos pirogues à l’endroit où se trouve les deux poteaux. Mais aujourd’hui, ce n’est plus possible. Le cours d’eau a avancé de plus de 20 mètres. C’est une situation inédite. Ça fait des années que je travaille ici. Jamais nous n’avons été aussi secoués par les eaux de cette manière. L’ampleur des dégâts ne peut laisser personne indifférent. Les clients pour les balades sont rares, notre clientèle la plus importante, les touristes. Ils paient 6000 FCFA pour une promenade qui ne dure que 15 mn. Les nationaux ne paient que la moitié, 3000 FCFA. La couleur de l’eau n’étant plus rose, les balades intéressent moins les visiteurs. Il y a aussi la cherté de la vie. Promouvoir le tourisme local pourrait aider à atténuer les effets de la crise qui sévit dans le secteur.»
«EN VERITE, 2023, C’EST LA PIRE DES ANNEES AU PLAN TOURISTIQUE…»
Toute l’activité économique est paralysée voire bloquée depuis les inondations que Dakar a enregistrées l’année dernière. Et jusqu’à nos jours, la situation ne s’est pas rétablie. Elle va de mal en pis. «Nous avons eu une saison morte cette année. Les touristes ne sont pas venus en masse. Si l’on établit une comparaison entre cette saison et celles des années précédentes», déplorent les acteurs. Selon un guide touristique, «A partir d’un simple constat, sans fournir les statistiques, nous sommes en mesure d’affirmer si la saison est bonne ou mauvaise. En vérité, 2023, c’est la pire des années au plan touristique, en terme d’affluence.»
Les raisons, à en croire certains individus, sont liées au fait que «Lac n’attire plus. Il a perdu son lustre d’antan. La couleur rose de l’eau qui suscitait beaucoup de curiosité a disparu. Pis, les touristes qui ont débarqué sur le Lac ont vite fait de déchanter. Ils ont tous été déçus. Car les photos du Lac qu’ils ont vues sur internet tranchent d’avec la réalité : la couleur de l’eau n’est pas la même. La coloration des eaux n’est pas rose. Si l’on se référé aux photos qui sont sur internet».
Une escroquerie ? «Non !», nous répondent les acteurs touristiques. Et de relever : «Cette situation semble se justifier par l’augmentation du niveau de l’eau, entrainant une forte baisse du taux de salinité et la disparition d’algues. Donc, il y a une perturbation de l’écosystème. Les facteurs qui permettent à l’eau d’être rose ont subi des aléas».
L’EXPLOITATION DU SEL RELEVANT DESORMAIS DU PASSE, DES RECOLTEURS RECONVERTIS EN MARAICHERS
L’exploitation du sel relève désormais du passé. Les 3000 personnes qui opéraient dans la filière sont contraints au chômage. Pourtant, l’activité était florissante, à en juger les quantités de sel qui sont produites : environ 30.000 à 60.000 tonne par an. Sur les berges du Lac, notamment sa partie sud, le maraichage est pratiqué. La culture de parsie chinoise et locale (un produit qui sert à assaisonner de la viande) domine les autres produits. Certains producteurs de sel se sont reconvertis dans cette activité.
Abdoulaye Sow, souligne : «nous sommes de devenus cultivateurs, par la force des choses. On ne peut plus produire du sel. Alors, il faut qu’on trouve une activité pour subvenir à nos besoins. Aujourd’hui, la situation que nous vivons est un désastre. Vous pouvez constater, de vous-même, la situation qui prévaut sur le terrain. L’ambiance n’est plus la même. Avec cet arrêt de l’exploitation du sel. C’était un travail harassant ! Mais c’est mieux que de rester à ne rien faire. En outre, l’activité est rentable», a-t-il soutenu. Maguette Ndour, président de la Commission sel était absent, dimanche, lors de notre passage.
Le Lac Rose se caractérisait également par une forte densité en sel, 120 g/l à 340 g/l, selon une étude réalisée par des scientifiques sénégalais. Une teneur en sel largement supérieur à celle de l’eau de mer qui peut en contenir jusqu’à 30g/l.
Source: XIBARU