Le fait, suffisamment rare, mérite d’être souligné. Entre début avril et la mi-juin 2023, Robert Bourgi a dédié plusieurs de ses précieuses heures à des médias sénégalais pour aborder les brulantes questions de l’heure. De ses différents exposés qui gardent la même trame, un casus belli à peine voilé : pour l’avocat français, figure emblématique d’une françafrique en phase d’obsolescence, Ousmane Sonko est une menace politique suffisamment sérieuse pour être endiguée. Mais, comment ?
Au meilleur des cas, Bourgi plaide une candidature de celui-ci en 2029, l’année où le président de Pastef serait « mûr » pour prétendre diriger le Sénégal. En attendant, Paris et Macron devaient également en prendre pour leur grade, eux qui semblent de plus en plus distants de Macky Sall. Lequel en est d’ailleurs conscient mais, ne dispose pas d’assez de marge pour changer le cours des évènements.
Le chef de l’Etat sénégalais, interrogé en mars dernier par nos confrères du journal L’Express n’avait point réfuté l’invite que Macron lui aurait adressée, suggérant de renoncer à sa candidature. A la question : « Est-ce que Macron vous a demandé de ne pas vous présenter » ? Macky Sall s’était juste contenté d’une réponse diplomatique : « (…) Nous avons des discussions sur différents sujets, y compris celui-là. Il (Macron) est libre d’avoir son opinion, d’exprimer des désirs, de faire faire part de sa volonté et, même, de prodiguer des conseils ». Mais, le président sénégalais sera trahi par cette suite dans la réponse servie aux journalistes : « Moi aussi, j’ai un point de vue personnel sur la politique qu’il mène ». Comme quoi, entre Paris et Dakar, l’amour n’est plus celle des premiers jours.
Et, Bourgi sait ce que cela pourrait coûter à son « ami » de président sénégalais. Si bien qu’il entame déjà l’opération de déconstruction de cette mauvaise image qu’un « complot international » est en passe de coller au chef de l’Etat Sénégalais. Mais, l’avocat et (ancien ?) ami de Gbagbo devra faire vite. Si Paris n’hésite plus à envoyer un émissaire à Ousmane Sonko, c’est que Macron ne s’en limite plus à dire qu’il « parle à tout le monde », à toute l’opposition sénégalaise, notamment. Plus que dans la parole, c’est le temps de l’action chez le président français ! Et, peu importe que la réciprocité présente le visage de Marine Le Pen ! Bourgi qui n’a pas une seule attache avec le « Patriote en chef », semble mesure l’ampleur de la « menace ».
Elhadji Mansour Ndiaye