Les partis politiques du Sénégal souffrent manifestement d’un déficit criard de démocratie interne. Il y prévaut, le plus souvent, la dynamique du « mouth ba moth » (se taire ou partir). En général, dans ces formations, le créateur-leader a des pouvoirs exorbitants. Il considère le plus souvent son parti comme un patrimoine personnel parfois à léguer même à ses enfants après son départ. Et ses partisans et proches y cultivent le culte de la personnalité faisant de ce dernier une sorte de messie dont la présence est indispensable au bon fonctionnement de la formation politique. Ainsi, il est difficile d’asseoir un débat contradictoire en interne. Et les récalcitrants l’apprennent à leurs dépens.
Les congrès deviennent rarissimes et le renouvellement des instances une simple formalité. Cette situation peut s’expliquer par plusieurs facteurs dont le premier est sans doute d’ordre culturel ou sociologique. Apparemment tout le monde est à la recherche d’un guide sur lequel s’adosser moralement avant de le faire économiquement.
La notion de « kilifeu » (autorité) va au-delà même de la sphère familiale ou religieuse. Et le sur plan économique, le leader ou chef de parti pourvoit à toutes les dépenses. Non seulement, il se charge des frais de fonctionnement, mais également les besoins des militants dont les sollicitations sont nombreuses. Il s’est ainsi développé, au fil des années, un ensemble de pratiques, une forme de culture de gestion pyramidale et autoritaire au sein de la plupart des partis politiques. Les seules exceptions ont été les partis de gauche dont la gestion est souvent assurée par un collectif. Malheureusement, ce sont des pratiques qui sont en porte à faux avec l’esprit et la lettre de la loi sur le fonctionnement des associations au Sénégal qui régit également les partis politiques. Si tout se passait bien, il y aurait eu des cotisations et autres recherches de financement comme l’acquisition de dons et autres avec le dépôt annuel de bilans financiers.
Malheureusement, le financement des partis étant peu contrôlé, le leader se débrouille comme il peut. La conséquence d’une telle situation c’est qu’une fois au pouvoir, les mêmes pratiques autocratiques sont perpétuées par les chefs de partis qui ont peu de culture des décisions concertées et consensuelles.
Bien sûr, les partisans et autres sympathisants sont aussi en partie responsables. En s’accommodant du confort et de la facilité de la situation, ils encouragent les créateurs de partis à s’installer à long terme dans la gestion sans partage.
En clair, nous avons besoin, comme le disait le Président Obama, d’institutions fortes y compris dans les partis politiques qui ont pour rôle non seulement d’encadrer les électeurs mais aussi d’accompagner les leaders pour ne faire de véritables managers des politiques publiques.
Assane Samb