« Le parrain », « le faiseur de roi », « le boss »: les surnoms ne manquent pas pour désigner Bola Ahmed Tinubu, candidat du parti au pouvoir aussi influent que controversé, donné vainqueur de l’élection présidentielle au Nigeria.
Il y a quelques mois encore, son influence en faisait le favori. Mais ces dernières semaines ont rebattu les cartes, notamment en raison de pénuries d’essence et de billets de banque qui empoisonnent la vie des Nigérians et alimentent le ressentiment contre le parti au pouvoir.
Certains dans son camp accusaient même la présidence de vouloir empêcher le « parrain » d’être élu.
« Emi Lokan. C’est mon tour« , n’a-t-il cessé de marteler pendant la campagne. Quitte à irriter par ce slogan une partie de l’opinion qui y voyait une convoitise affichée du pouvoir. Selon la Commission électorale (Inec), Bola Tinubu aurait cumulé plus de 8,8 millions de voix, remportant dès le premier tour l’une des élections les plus disputées de l’histoire démocratique du Nigeria.
Sous son chapeau traditionnel yorouba, cet homme de l’ombre a gardé une influence considérable dans sa région natale du sud-ouest.
Fin stratège, il a toujours été perçu comme l’homme derrière toutes les nominations politiques dans son fief alors que le clientélisme reste omniprésent au Nigeria, jusqu’à se vanter d’avoir fait élire le président sortant Muhammadu Buhari. Pour beaucoup au Nigeria, l’influence du chef historique du Congrès des progressistes (APC) a propulsé M. Buhari à la tête de l’Etat en 2015 et lui a permis de se faire réélire en 2019.ù
Ce richissime musulman de 70 ans, ardent défenseur de la démocratie en exil pendant la dictature militaire des années 1990, a gravi tous les échelons politiques, une ascension jalonnée d’accusations de corruption, sans aucune condamnation.
Ancien sénateur puis gouverneur de Lagos (1999-2007), poumon économique du pays le plus peuplé d’Afrique, l’un des leaders historiques du parti au pouvoir veut désormais réaliser « l’ambition de toute une vie« .
En tant que candidat de l’APC, Bola Tinubu était fragilisé par le bilan jugé décevant des deux mandats du président Buhari. Sa riposte : mettre en avant ses succès à Lagos, s’attribuant la transformation spectaculaire de la capitale économique durant ses deux mandats, marqués par l’afflux de capitaux étrangers.
Dans un pays où l’état de santé des candidats constitue un sujet très sensible, l’opposition affirme que Bola Tinubu, qui a souffert à plusieurs reprises de tremblements en public, souffre de la maladie de Parkinson. L’intéressé réfute, notamment à coups de vidéos de lui moulinant sur un vélo d’appartement ou en train de danser.