L’action militaire actuelle de la Russie contre l’Ukraine a ravivé les vieux démons de la guerre froide et fait revivre la bipolarisation du monde même si certains pays se disent non-alignés. Faute de pouvoir entamer une quelconque action militaire directe pour venir en aide à l’Ukraine, les pays occidentaux ont entamé une vaste opération d’isolation de la Russie au plan international.
Dans cette dynamique, des sanctions chaque jour plus importantes sont prises par les Etats-Unis et les pays européens contre la Russie. Et toutes les actions diplomatiques entamées ont pour but d’asphyxier ce pays et de neutraliser ses dirigeants et hommes d’affaires les plus influents.
Poutine est qualifié de ‘’dictateur’’, de ‘’boucher’’ et de ne pas respecter le droit international, etc. Et ça, c’est de bonne guerre. Nous sommes dans la guerre de communication avec cependant l’envie de voir le rapport de force basculer en faveur de l’Ukraine. Mais, force est de croire, qu’il n’est plus possible, aujourd’hui, d’isoler la Russie.
D’abord parce que le pays est une puissance économique à laquelle dépendent de nombreux autres pour leurs ravitaillements dans de nombreux domaines y compris énergétiques. Et cette réalité, les pays européens en sont conscients.
C’est une des raisons pour lesquelles d’ailleurs l’Europe n’a rien à gagner dans le fait de suivre les Etats-Unis sur le terrain de la radicalisation contre la Russie. Ensuite, la Russie a de bonnes raisons de craindre l’entrée de l’Ukraine dans l’Otan et le harcèlement subi par les populations russophones du Donbass. Et là-dessus, tous les contrats signés à titre de prévention pour éviter une escalade militaire dans la zone en sécurisant tous les pays signataires n’ont pas été respectés. Les occidentaux étaient surtout préoccupés par l’élargissement de leur alliance avec toutes les conséquences que cela implique.
En clair, le cas ukrainien a été la goutte d’eau de trop. La Russie pouvait difficilement croiser les bras et laisser faire là où les Américains ont réagi vigoureusement, en menaçant d’utiliser l’arme nucléaire lors des évènements de Cuba de 1962 avec le débarquement de la Baie de Cochon. Enfin, la dernière raison pour laquelle l’isolement de la Russie est voué à l’échec, c’est que de nombreux pays comme Israël, la Turquie, la Chine et même des pays africains, ont affiché une prudente neutralité dans le conflit.
En effet, le conflit tel qu’il évolue a permis à tous les observateurs de se rendre compte du degré de fragilité de la paix mondiale avec la politique de blocs (Est-Ouest) qui est encore ancrée dans les esprits. Si les uns comme les Etats-Unis peuvent faire une cinquantaine de guerre lors de ces dernières décennies, si la Lybie, l’Irak, la Yougoslavie et bien d’autres pays peuvent être attaqués parfois sur la base de mensonges d’Etat, il est nié aux autres le droit de défendre leurs territoires et de se soucier de la sécurité de leurs concitoyens. Le droit international ne serait applicable que contre des pays qui ne partagent pas les mêmes préoccupations idéologiques que l’Occident.
C’est malheureusement pour cette raison que l’Ukraine et bien des pays européens sont actuellement sacrifiés sous l’autel d’intérêts géostratégiques de blocs.
Georges E. Ndiaye