La nuit d’application du couvre-feu a été émaillée d’actes de résistance de la part de populations notamment jeunes de différents quartiers de Dakar.
Les forces de l’ordre (Police et Gendarmerie) ont eu du fil à maintenir la sécurité en imposant ces mesures à des jeunes réticents et déterminés.
Si la situation a pu être finalement maîtrisée, il n’en demeure pas moins que ces actes sont symptomatiques du manque d’adhésion à la nouvelle mesure d’état d’urgence assortie d’un couvre-feu fut-il de 21 heures à 5 heures du matin.
La raison principale à cela, à notre sens, c’est le fait que le couvre-feu a surpris tout le monde y compris les journalistes. Nul ne pouvait penser qu’à peine cinq jours après son adresse à la nation et suivie d’une conférence de presse où il n’a pas été question de cela, le Président de la République allait prendre une telle mesure.
Certes, il y a eu une réunion de cinq tours d’horloge avec les spécialistes, ce qui est à saluer et que l’urgence de l’heure recommande une réaction à sa mesure, mais, il n’en demeure pas moins qu’une telle privation de liberté, on ne le l’impose avec surprise.
Il fallait préparer l’opinion, impliquer divers leaders, étudier différentes stratégies avant d’en arriver là. Ça aurait été mieux accepté et assimilé même si par ailleurs, beaucoup de sénégalais sont encore dans le déni.
En effet, non seulement ils sont nombreux à croire que le coronavirus n’existe pas et que les mesures barrières sont inutiles, mais certains estiment qu’il y a de la manipulation et que tout cela vise justement à préparer l’opinion aux vaccins.
Il y a donc, déjà, une forte résistance psychologique à ce qui se passe, malgré les médias internationaux qui relatent, à longueur de journée, les dégâts du virus dans d’autres pays.
C’est pourquoi, le retour du couvre-feu a été analysé comme un désir de porter atteinte, gratuitement, aux libertés des uns et des autres.
Et le plus grave, c’est que certains parmi ceux qui l’ont observé n’en voient pas forcément l’utilité. Car, ils sont nombreux, nos concitoyens, à se dire que le virus ne circule pas seulement la nuit et qu’on n’a pas encore pris les bonnes mesures.
Certains pointent du doigt des lieux de rassemblement comme les marchés où le port du masque est loin d’être observé.
Même si, dans le transport, de nouvelles mesures sont annoncées, il n’en reste pas moins que celles-ci ont voulu allier nécessité économique et nécessité médicale et s’avèrent donc insuffisantes.
Permettre dix places debout dans les transports en commun Tata en plus des places assises et une façon de répondre aux exigences des transporteurs et non de la prévention.
Pis, la nuit, la plupart des travailleurs actifs sont déjà chez eux. Ceux qui restent en activité sont minimes. C’est dire à quel point la portée de la démarche, bien qu’importante, est limitée.
Elle l’est d’autant plus que c’est un état d’urgence partiel. Or, d’autres villes de l’intérieur comme Kaolack et Touba sont également dans un cycle accéléré de contamination et méritent que l’on s’y attarde du fait surtout de la réticence de certains à porter des masques.
Il aurait fallu généraliser cette mesure à tout le pays ou simplement y sursoir.
On comprend en effet que les autorités aient entendu marquer les esprits par cet acte et siffler la fin de la récréation. Mais, elle reste tellement impopulaire cette fois-ci, qu’il aurait fallu la faire accompagner d’une communication appropriée.
Bien sûr, il n’est jamais trop tard de bien faire. Il ne serait pas superflu de travailler à peaufiner toute une stratégie de communication autour de la Covid-19, de la seconde vague, de sa mutation et surtout du vaccin.
Car, si l’on ne fait rien, le terrain sera alors laissé aux sceptiques et aux auteurs des théories du complot qui vont ainsi assoir et faire accepter leurs théories.
Nous subissons actuellement le diktat des sceptiques qui, comme le virus, ont trouvé un terrain propice à faire douter le maximum de personnes et à faire échouer la lutte.
Assane Samb