Les violences faites aux femmes et aux filles restent une réalité en Afrique. Les leaders traditionnels misent sur l’harmonie sociale pour faire face à ce fléau.
Pour faire face aux violences faites aux femmes et aux filles, les leaders traditionnels portent leur voix pour la cause féminine. Selon la Reine d’Oussouye, Ahan Kalidji Béatrice, dans son royaume, il est interdit de parler mal à quelqu’un ou d’insulter. « La violence orale peut conduire à la mort où le suicide.
La problématique de la violence est plus difficile à régler dans les foyers. J’ai des ambassadeurs et mbassadrices qui m’aident à faire la sensibilisation. J’ai demandé à tout le monde à ce qu’on brise le silence », dit-elle.
Et de poursuivre : » Quand il y’a des problèmes dans un foyer, nous cherchons tous à savoir de quoi il s’agit. Souvent l’homme ne veut pas dire le vrai problème. Je convoque l’homme, et parfois c’est la femme qui a tort, mais tu ne vas pas dire à la femme que tu as tort devant son mari, voilà, tu vas faire tout pour régler ces problèmes ». Elle indique que dans son royaume, il est formellement interdit à un homme de lever la main sur sa femme. « Si c’est l’homme qui a frappé sa femme, ce sont les hommes du quartier d’abord qui vont rendre visite au mari pour lui parler », explique-t-il.
Pour le Jaraaf de Bargny, Moussa Ndione, Honorable Reine d’Oussouye, la détermination à mobiliser les leaders traditionnels dans la lutte contre les violences faites aux femmes témoignent d’une compréhension profonde du rôle essentiel qu’ils doit jouer dans la transformation de nos sociétés. « Cette initiative est d’autant plus importante qu’elle reconnaît la place centrale des autorités traditionnelles dans le changement des normes sociales. En tant que gardiens de nos traditions, nous avons la responsabilité d’être à l’avant-garde de ces évolutions positives », dit-il.
Et de poursuivre : » En tant que Jaraaf de Bargny, je porte la responsabilité ancestrale de préserver l’harmonie sociale dans notre communauté. Cette mission englobe naturellement la protection des femmes et des filles contre toute forme de violence ». Il indique que dans la société sénégalaise, les leaders traditionnels sont les gardiens des valeurs culturelles positives qui prônent le respect, la dignité et la protection de tous les membres de la communauté. « Notre position nous permet d’influencer les comportements et de promouvoir des changements positifs. La lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles exige des actions tangibles et mesurables au niveau communautaire. En tant que Jaraf de Bargny, j’ai pu observer que les interventions les plus efficaces sont celles qui s’appuient sur nos structures traditionnelles tout en intégrant les principes modernes de protection des droits humains. Notre autorité traditionnelle nous confère une position unique pour influencer les comportements et catalyser les changements nécessaires dans nos communautés. C’est à travers cette légitimité que nous pouvons mobiliser efficacement les ressources locales et obtenir l’adhésion de tous », fait-il savoir.
A l’en croire, l’expérience leur a montré que la transformation des normes sociales nécessite une approche multidimensionnelle. « La médiation traditionnelle, lorsqu’elle est exercée avec sagesse et dans le respect des droits des femmes, constitue un outil puissant de prévention et de résolution des conflits. Notre rôle ne se limite pas à la simple application des coutumes; il s’étend à l’interprétation progressiste de nos traditions pour promouvoir l’égalité et la dignité. Cette approche permet de préserver notre identité culturelle tout en l’adaptant aux exigences de notre époque », estime-t-il.
De son avis, la mise en œuvre d’actions concrètes repose sur trois piliers fondamentaux à savoir la médiation traditionnelle rénovée, l’éducation communautaire inclusive, et la lutte active contre les pratiques néfastes. « Ces axes d’intervention s’inscrivent dans une démarche globale visant à créer un environnement protecteur pour les femmes et les filles. Notre engagement dans ces domaines doit être constant, visible et soutenu par des mécanismes de suivi efficaces, permettant d’évaluer l’impact réel de nos actions sur le terrain« , martèle-t-il.
Sur la médiation et résolution des conflits, il énumère l’intervention rapide dans les situations de violence conjugale, l’accompagnement des familles vers des solutions respectueuses, la collaboration avec les autorités locales et services sociaux, l’éducation communautaire, la sensibilisation sur les droits des femmes lors des assemblées traditionnelles, la promotion de l’éducation des filles et le dialogue intergénérationnel sur l’évolution des normes sociales. « Le changement social profond nécessite un engagement personnel fort et visible des leaders traditionnels. Notre position d’autorité morale nous confère non seulement des privilèges, mais surtout des responsabilités envers notre communauté » se rejouit-il. Il lance un appel à tous ses pairs, leaders traditionnels d’Afrique de s’unir leurs forces et leur sagesse ancestrale pour être les catalyseurs d’un changement positif dans les communautés.