Dans un communiqué rendu public ce mercredi, l’Association des utilisateurs du Tic (ASUTIC) a approuvé la décision des nouvelles autorités d’arrêter l’activiste Bah Diakhaté et l’imam Ndao pour propos diffamatoires et incendiaires à l’endroit du premier ministre. L’association indique que le respect à la liberté d’expression ne peut être invoqué dans ce cas d’espèce et invite les autorités à adopter une approche collaborative de multi-acteurs pour réguler les contenus diffamatoires sur les réseaux sociaux.
Les arrestations du militant du régime sortant et de l’imam Ndao continuent de susciter une vague de réactions. Si d’aucuns condamnent ces arrestations, ce n’est pas le cas de l’association des utilisateurs du Tic qui pense que la mise aux arrêts des deux nommés est tout à fait normale. En effet, l’association estime que ces arrestations sont justifiées du point de vue de la loi. « Le respect du droit à la liberté d’expression ne peut être invoqué pour justifier sa jouissance par des propos diffamatoires et incendiaires qui portent atteintes à la vie privée, à la réputation et à l’honneur d’une personne. Les normes internationales et la législation nationale comportent des dispositions claires qui, d’une part, garantissent la liberté d’expression, et d’autre part, la limitent », lit-on dans le communiqué.
Pour appuyer ses propos, l’Asutic cite l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui dispose : «Nul ne peut être inquiété pour ses opinions. Toute personne a droit à la liberté d’expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix. L’exercice des libertés prévues au présent article comporte des devoirs spéciaux et des responsabilités spéciales. Il peut en conséquence être soumis à certaines restrictions qui doivent toutefois être expressément fixées par la loi et qui sont nécessaires ». Dans le même ordre d’idées, les utilisateurs du Tic brandissent l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui dispose « Toute personne a droit à l’information. Toute personne a le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements pour approuver l’arrestation de Bah Diakhaté et de l’imam Ndao. Ainsi, selon l’association, il ressort de la lecture combinée de toutes ces dispositions que la liberté d’expression n’est pas absolue, mais elle est plutôt restreinte aussi bien par le droit international que celui national pour garantir le respect du droit à la vie privée, de la réputation d’autrui et des bonnes mœurs.
À cet effet, l’association des utilisateurs du Tic soutient que c’est dans le respect du droit international et national, en conformité avec les engagements internationaux de l’État du Sénégal et de sa législation interne, que les autorités ont pris les décisions de faire arrêter les personnes qui ont tenu des discours incendiaires et diffamatoires. Mieux, elle mentionne que « les décisions ont été prises en toute légalité mais leur caractère légitime et nécessaire, pour préserver la paix et la cohésion sociale, ne saurait être sérieusement remise en cause ».
Toutefois, l’Asutic indique que les poursuites pénales, confortées par une opinion publique nationale qui exprime en permanence sa désapprobation des discours discourtois et dégradants, ne sauraient être la solution de ce phénomène. Il faut, selon elle, que les autorités rompent dès à présent avec l’idée selon laquelle les actions pénales contre les pourvoyeurs de haine et des propos outrageants sont une solution efficace à long terme pour réguler la liberté d’expression sur Internet et les réseaux sociaux. Ainsi, au-delà des arrestations policières et des poursuites pénales, l’association invite les autorités à adopter et développer une approche collaborative de type multi-acteurs pour réguler les contenus diffamatoires et incendiaires sur internet et les réseaux sociaux. Dans cette perspective, elle appelle le nouveau régime à élaborer un projet de loi modifiant le code pénal pour y insérer, dans un premier temps, une amende et/ou un travail d’intérêt général, et dans un second temps, en cas de récidive, recourir aux peines privatives de liberté.
En outre, les utilisateurs du Tic estiment qu’il serait souhaitable de définir une stratégie d’éducation à la citoyenneté à l’ère numérique avant d’appeler les médias à faire preuve de responsabilité dans le traitement de l’information sur internet et les réseaux sociaux en prenant conscience de leurs responsabilités sociétales.
EL HADJI MODY DIOP