Sans soutien politique unifié des États membres et du Conseil de sécurité là où les missions sont déployées, « la police de l’ONU ne peut qu’atténuer les conflits, pas les résoudre », a insisté le Secrétaire général adjoint aux opérations de paix, Jean-Pierre Lacroix, ce mardi devant le Conseil de sécurité.
Le nombre, l’intensité et la durée des conflits dans le monde sont à leur plus haut niveau depuis la fin de la guerre froide et dans un contexte de tensions géopolitiques accrues, « y compris au sein de ce Conseil », les opérations de l’ONU ne peuvent atteindre que les « objectifs immédiats » du maintien de la paix, comme préserver les cessez-le-feu, protéger les civils, arbitrer les conflits locaux et renforcer les institutions lorsque cela est possible, a développé le haut responsable.
Lors de cette réunion annuelle avec les chefs des composantes de police des Nations Unies en poste dans les missions sur le terrain, Jean-Pierre Lacroix a aussi souligné l’importance de renforcer et d’adapter continuellement le maintien de la paix aux conditions changeantes. Les policiers servant sous le drapeau de l’ONU doivent être correctement préparés, équipés et dotés de ressources pour faire face aux défis importants qui pèsent sur le multilatéralisme et le maintien de la paix.
« Réponses spécifiques »
« De nombreux défis pèsent aujourd’hui sur la paix, la sécurité et le développement dans le monde : déclin du respect de l’État de droit, corruption, mépris du droit international, criminalité transnationale organisée, atteintes aux droits de l’homme et rétrécissement de l’espace civique. Tous appellent des réponses policières uniques et spécifiques », a souligné le chef des opérations de paix.
M. Lacroix a rappelé que le dernier rapport sur la performance globale des opérations de maintien de la paix de l’ONU soulignait un écart entre leurs mandats et ce qu’elles peuvent réellement réaliser. Pour certaines missions, l’écart est devenu « assez important », a-t-il relevé.
En réponse, l’ONU continuera de renforcer son initiative Action pour le maintien de la paix (A4P) (A4P), en particulier la stratégie A4P+. Les priorités incluent la garantie de la cohérence des stratégies politiques et une plus grande intégration stratégique et opérationnelle. Le soutien du Conseil est là essentiel, a pointé M. Lacroix, en avertissant cependant que « les opérations de maintien de la paix de l’ONU ne peuvent pas accomplir beaucoup de choses à elles seules ».
Besoin d’unités francophones
Le Conseiller pour la police des Nations Unies, Faisal Shahkar, a demandé au Conseil de répondre au « besoin criant » d’agents de police dotés d’une expertise dans l’analyse et la lutte contre la criminalité organisée ; la médecine légale ; les services de police axés sur la communauté; la violence sexuelle et sexiste; l’intégration de la dimension de genre; ainsi que la sensibilisation et l’atténuation des risques liés aux engins explosifs improvisés. Il a aussi évoqué un besoin d’unités francophones et mixtes disponibles pour un déploiement rapide et dotées de capacités de pointe, y compris des groupes d’intervention, de réaction rapide, canins et fluviaux.
La commissaire de la MINUSS alerte sur les violences de genre
La Commissaire de police de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), Christine Fossen, a, quant à elle, souligné la nécessité d’une police tenant compte de la perspective de genre.
« Dans un environnement géopolitique mondial difficile, les menaces telles que la discrimination basée sur le genre, les événements climatiques défavorables tels que les inondations et les sécheresses, les conflits liés au climat et l’insécurité alimentaire se sont davantage ancrées et affectent de manière disproportionnée les femmes et les filles », a-t-elle expliqué au Conseil.
Donnant des exemples tirés du terrain, comme la situation à Bentiu où quatre années de pluies incessantes, d’inondations et un accès limité au bois de chauffage et aux moyens de subsistance pour les femmes ont coïncidé avec une augmentation des violences sexuelles, elle a jugé évident qu’il fallait « améliorer notre compréhension de ces nouvelles dimensions ainsi que la nature de notre réponse policière, y compris la formation, la sensibilisation et l’instauration de la confiance ».