On ne peut pas ne pas être sidéré par le degré de banalisation de nos institutions mais surtout par la manière dont le droit est de plus en plus interprété sur la place publique. Sans aucune pudeur. Parfois, par des hommes de l’art, censés maitriser le domaine et qui, pour des raisons politiques, s’adonnent à des formes d’interprétation qui changent complètement le sens de réalités que l’on enseignait d’une manière assez codifiée dans les universités. Il ne s’agit nullement de polémiquer.
Cette chronique n’est pas faite pour cela. Donc, nous ne citerons pas de noms. Mais nous évoquerons des faits et des réalités du moment qui donneront une idée assez nette de la situation que nous dénonçons. Tenez par exemple, l’interprétation que nous donnons, pour certains, à la contumace. Celle-ci est manifestement erronée ou en tout absolument contraire à ce qui est enseigné jusqu’ici.
La première dérive, évidente, c’est de considérer que la personne peut être jugée par contumace alors que nous savons exactement là où elle est. Ce n’est pas ce que nous avions appris. La seconde chose, est de dire que la personne, malgré le fait qu’elle soit arrêtée, est toujours considérée comme contumax parce qu’elle l’a été pour autre chose. Ce n’est pas ce que nous avions appris. Des exemples patents et bien d’autres qui font que nous naviguons parfois dans des comportements hasardeux qui suscitent moult interrogations. Il s’y ajoute le fait que l’on refuse le simple retrait de fiches de parrainage à une coalition, l’assimilant à une personne physique considérée comme inéligible. Or, nous savons tous qu’une coalition transcende le statut d’un leader qui y fait allégeance même si celle-ci porte son nom. Le nom de cette structure étant libre et le retrait n’est pas encadré par des exigences particulières.
S’agissant des institutions, elles sont tellement banalisées que l’on confond l’administration au parti dominant au pouvoir. C’est pour cette raison que lorsqu’un attentat a été perpétré dans un bus, on a vite fait de crier à la théorie du complot et d’accuser les forces de défense et de sécurité de fabriquer des preuves. Aujourd’hui que des suspects sont arrêtés et leurs identités connues, il est clair que les informations données à ce propos étaient exactes. D’ailleurs, certains ont commencé par exiger les corps des victimes et leurs identités parce qu’ils ne croient plus à tout ce qui vient des autorités. Et les exemples à ce propos sont légion. Donc, autant du côté des autorités, on malmène le droit, autant du côté d’une partie de l’opposition, on ne cesse de bafouer les institutions. Et tout ceci, pour des raisons de politique politicienne. C’est pourquoi, il est inutile de multiplier les exemples.
L’urgence, c’est de permettre aux sachants, vaillants professeurs ou sérieux praticiens, d’intervenir pour édifier l’opinion. Ou davantage le faire. Parce que nous n’ignorons pas qu’ils l’ont déjà fait des lettres ouvertes aux allures de pétitions. Et ils étaient une centaine à signer. Mais, cela ne suffit pas. Il faudra se faire inviter dans les débats sur les plateaux et dans les studios, en français et dans nos langues, pour édifier l’opinion. Car, beaucoup des Professeurs comme Kader Boye, Babacar Kanté, Jacques Mariel Nzouankeu, Amsatou Sow Sidibé, Amadou Faye-Pénaliste et bien d’autres qui ont formé ces générations de juristes sont encore heureusement, en vie. Ils ne peuvent pas se taire quand la maison brûle. Nous savons qu’ils s’en désolent mais ils doivent davantage taper sur la table. Car, dans ce pays, on a tellement banalisé les choses, que le risque c’est que l’ignorance prenne le dessus sur la science et que les sachants passent leur temps à écouter les égarés. Or, dans ces conditions, il ne faudrait pas s’étonner que le pays marche à reculons et que la violence soit érigée en mode de vie. Ou qu’il y ait 200 à vouloir être Président de la République.
Assane Samb