« Les laboratoires biomédicaux ne permettent pas toujours d’éclairer les médecins, et sages-femmes dans leurs diagnostics ». Cette assertion est du professeur Amadou Moctar Dieye, directeur national des laboratoires de santé publique du Sénégal. Il s’exprimait hier, lundi 18 septembre, lors de la rencontre de présentation du programme spécial de développement des laboratoires qui sera inscrit sur une période de quatre ans pour un montant de plus de 29 milliards.
La disponibilité et l’accessibilité des services de diagnostic et de laboratoire sont indispensables à la prise en charge des patients, à la prévention des maladies et à la recherche. Malheureusement, tous les hôpitaux du Sénégal n’en disposent pas. Ils sont soit confrontés à une disponibilité de personnel qualifié dont des pharmaciens ou médecins biologistes, techniciens supérieurs en biologie médicale, médecins anatomo- pathologistes, de plateau technique ou encore de réactifs. Dans plusieurs structures de santé du pays qui en disposent, peu respectent les normes internationales de qualité au sein des laboratoires.
Dans les structures de niveau 3, certaines analyses essentielles sont envoyées à l’étranger car non disponibles dans tout le pays. Consciente de tous ces manquements, la direction nationale des laboratoires de santé publique a présenté hier, lundi, son programme spécial de développement des laboratoires d’expertise biomédicale pour validation. Un programme qui cherche, selon les acteurs, à rétablir l’équité et à doter le pays d’un personnel qualifié suffisant et de mise à niveau des laboratoires en équipements nécessaires pour réaliser les analyses et pour l’application des bonnes pratiques de gestion de la biosécurité garantissant la protection de la santé humaine et de l’environnement. Pour le professeur Amadou Moctar Dièye, directeur national des laboratoires, la situation actuelle ne permet pas toujours aux laboratoires biomédicaux d’éclairer les médecins et sages-femmes dans leurs diagnostics. « Dans nos laboratoires, il y a des problèmes de ressources humaines qui ne sont pas suffisantes ou qui ne sont pas très bien réparties. Les laboratoires demandent des biologistes, hors dans certains, il n’y en a pas. Donc, il y a un problème de ressources humaines qui se pose. Mais, il y a aussi la disponibilité d’infrastructures. Dans certaines structures sanitaires, les bâtiments qui les hébergent ont été construits depuis des années. D’autres ne respectent pas forcément les normes architecturales. Il y a autant d’actes qu’il faut poser pour avoir des laboratoires beaucoup plus performants», a-t-il fait savoir.
Pour le professeur Dièye, des gaps ont été identifiés. « Nous voulons augmenter la masse critique de biologistes et cela aiderait à renforcer le système des laboratoires».
90% des activités dans les laboratoires sont celles de routine
Dans les laboratoires des structures de santé, l’accent est souvent mis dans les activités de routine. Peu font de la recherche pour booster la prévention. Un constat qui a amené le professeur Dièye à affirmer : « 90% voire plus dans nos laboratoires, ce sont les activités de routine à savoir quand quelqu’un est malade, il fait un bilan. Ce sont ces activités de biochimie et d’hématologie qui constituent presque plus de 90 % de nos activités de laboratoires. Nous sommes appuyées par des partenaires techniques et financiers qui mettent l’accent sur les épidémies. Et nous pensons que nous pouvons élaborer notre propre plan dans lequel nous allons prendre en compte aussi bien les activités de routine que les épidémies mais aussi les autres maladies courantes».
Le Sénégal vers l’autonomie
Pour le ministère de la Santé et de l’action sociale, le Sénégal a l’avantage de disposer d’un réseau dense de laboratoires biomédicaux publics et privés, civils, militaires et paramilitaires, à tous les niveaux de la pyramide sanitaire qui sont implantés dans les centres de santé, des établissements publics de santé de niveaux 1, 2 et 3, les universités et les instituts dont les principales activités sont le diagnostic, la recherche, la formation et la surveillance épidémiologique. Cependant, il a estimé que pour instaurer la couverture sanitaire universelle et atteindre les objectifs de développement durable liés à la santé, il est indispensable d’améliorer la disponibilité des services de diagnostic et d’en élargir l’accès. « Cependant, certaines faiblesses sont notées dans nos systèmes de laboratoires surtout lors de la gestion de la pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19). C’est pour éviter ces genres de situation que nous devons disposer de services de laboratoire les plus performants possibles » a souligné le conseiller technique du ministère de la santé, Docteur Mamadou Sarr.
Et de poursuivre : « C’est donc pour mieux nous préparer aux futures pandémies mais aussi pour améliorer la prise en charge des patients que le Sénégal s’est engagé à élaborer et à mettre en œuvre un Programme spécial de Développement des Laboratoires, pour la période 2024-2028. Il devrait servir de base pour notre pays pour disposer d’un système de laboratoire capable de prendre en charge le diagnostic des maladies de routine mais également des maladies à potentiel épidémique, partout sur le territoire national. »